Inscription automatique sur les listes électorales
Question de :
M. Emmanuel Mandon
Loire (3e circonscription) - Les Démocrates
M. Emmanuel Mandon attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le développement du phénomène de l'abstention lors des scrutins locaux et nationaux. Hormis le contexte exceptionnel du dernier scrutin issu de la dissolution de l'Assemblée nationale, la progression lente mais régulière de l'abstention telle qu'observée ces dernières décennies pour les élections européennes, les élections départementales ou régionales, affecte les élections municipales, les élections législatives à l'exception dans une moindre mesure, les élections présidentielles. Face à ce qui apparaît être un véritable mouvement de fond, il lui semble nécessaire de prendre en considération les multiples facteurs en cause. M. le député souhaiterait ainsi souligner le fait que, dans de nombreuses communes urbaines, la mise à jour de la liste électorale reste une difficulté. La forte mobilité géographique d'une partie de la population, comme le montrent chaque année les opérations de recensement effectuées par l'Insee, nécessite sans aucun doute de repenser l'acte d'inscription sur les listes électorales. Actuellement, conformément à l'article L. 11 du code électoral, l'inscription d'un citoyen sur la liste de la commune résulte d'une démarche volontaire. L'introduction d'une mesure d'inscription d'office sur les listes électorales en 2019 pour les jeunes citoyens âgés de 18 ans et la mise en place du répertoire électoral unique, n'ont pas permis à ce jour d'inverser un phénomène qui relève d'une tendance lourde puisque plus de 5 millions de citoyens en âge de voter ne sont pas inscrits sur les listes électorales et que 7 millions sont mal inscrits, une grande partie d'entre eux ne déclarant pas leur changement d'adresse. 12 millions de Français se trouvent ainsi, de fait, éloignés ou très éloignés du système électoral, une situation unique en Europe. Divers pays démocratiques ont choisi l'inscription automatique, d'autres des systèmes plus incitatifs. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer son sentiment sur ce sujet et de lui préciser en particulier sa position à l'égard de la proposition visant à rendre automatique l'inscription sur les listes électorales en cas de changement de domicile ou de résidence.
Réponse publiée le 27 mai 2025
En 2024, 99 % des Français de moins de 30 ans et plus de 95 % des Français en âge de voter étaient inscrits sur une liste électorale, contre respectivement 88 % et 85 % en 2018. Cette progression témoigne de l'efficacité des actions mises en œuvre par le Gouvernement pour accroître le taux d'inscription sur les listes électorales. En particulier, la mise en place du répertoire électoral unique (REU), créé par la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016, a permis de fiabiliser les listes électorales avec par exemple la radiation automatique des personnes décédées et des personnes privées de leur droit de vote par le juge, la garantie d'une inscription unique de chaque électeur (et donc la suppression des doubles inscriptions) et la fiabilisation de l'identité des électeurs en reprenant celle du répertoire national d'identification des personnes physiques. En outre, grâce à la procédure d'inscription d'office des jeunes majeurs, la quasi-intégralité des jeunes sont inscrits sur une liste électorale dès le lendemain de leurs 18 ans. Enfin, des démarches en ligne comme « Interroger sa situation électorale » (ISE) et « Demande d'inscription sur les listes électorales » (DILE) permettent à chaque électeur de s'inscrire sur les listes électorales en quelques minutes. Selon l'étude publiée par l'Insee le 6 mars 2024, la non-inscription concernait, en 2022, 5,8% des Français en âge de voter, soit 2,9 millions de personnes. S'agissant de la mal-inscription sur les listes électorales, l'étude de l'INSEE relève que 16,5 % des Français inscrits sur les listes électorales pour l'élection présidentielle de 2022, soit 7,7 millions de personnes, étaient inscrits dans une autre commune que leur commune de résidence. Ces électeurs ne correspondent pas tous à des situations de mal-inscription dans la mesure où le code électoral prévoit des dérogations. Il est donc nécessaire de distinguer plusieurs situations : 2,2 millions sont des jeunes de moins de 26 ans : ces derniers ont le droit de s'inscrire dans la commune de leurs parents et ne sont donc pas nécessairement mal inscrits ; 1,7 millions ont déménagé récemment : ils sont susceptibles d'être mal inscrits en cas d'absence de mise à jour de leur situation électorale ; 3,5 millions ne présentent pas de caractéristiques particulières : il peut s'agir d'électeurs votant dans la commune de leur résidence secondaire, comme le droit les y autorise, ou d'électeurs réellement mal inscrits. Le nombre précis de mal-inscrits demeure donc malaisé à appréhender. Pour continuer à lutter contre la mal-inscription, le ministère de l'intérieur conduit des actions d'administration proactive visant à améliorer le recours des Français aux démarches d'inscription sur les listes électorales. L'objectif est que les électeurs mettent à jour régulièrement leur inscription sur les listes électorales, démarche entièrement dématérialisée qui ne prend que quelques minutes et qui est possible tout au long de l'année. Des actions ciblées ont été mises en œuvre en amont des élections européennes de 2024 : diffusion par voie postale d'un courrier invitant les personnes ayant récemment procédé à un déménagement à actualiser leur inscription sur les listes électorales ; formation des conseillers France Service à la détection proactive de non-inscription et de mal-inscription sur les listes électorales ; campagne de publicité en ligne pour inciter les personnes faisant des recherches en lien avec la thématique « déménagement » à s'inscrire sur les listes électorales ; communication sur les réseaux sociaux avec les comptes du ministère, pour rappeler les informations-clefs en matière d'inscription sur les listes électorales ; communication sur le site « service-public.fr ». S'agissant de l'inscription automatique, les démarches en ligne développées par le ministère visent à rendre l'inscription sur les listes électorales la plus simple et la plus rapide possible pour l'électeur. Des messages d'incitation à la mise à jour de son inscription électorale sont diffusés dans les courriels envoyés dans le cas d'un changement d'adresse (demande de réexpédition postale, changement d'adresse sur le site d'administrations comme celui des impôts - DGFIP -, etc.). Compte tenu des différents motifs (résident, propriétaire, associé majoritaire d'une société, etc.) qui permettent de s'inscrire sur les listes électorales, le principe de liberté de choisir son lieu d'inscription et de faire soi-même la démarche de changement ne saurait être remis en cause. L'inscription automatique pourrait contraindre cette liberté. En outre, l'inscription automatique des électeurs reviendrait à remettre en cause le rôle du maire qui est le garant de la sincérité de la liste électorale. Le maire se prononce sur chaque demande d'inscription après instruction du dossier. Sa décision est susceptible de faire l'objet d'un recours administratif préalable obligatoire puis d'un recours devant le tribunal judiciaire. Enfin, une inscription automatique sur les listes électorales nécessiterait la constitution d'une base nationale de population intégrant les données personnelles, dont les adresses, de chacun des électeurs. Un tel registre serait difficilement compatible avec les principes de la protection de la vie privée et des données personnelles des citoyens français. Dès lors, le Gouvernement entend poursuivre ses efforts pour informer chaque électeur et simplifier les démarches d'inscription sur les listes électorales tout en conservant l'initiative de l'électeur et les prérogatives du maire.
Auteur : M. Emmanuel Mandon
Type de question : Question écrite
Rubrique : Élections et référendums
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 15 octobre 2024
Réponse publiée le 27 mai 2025