Revalorisation du statut d'AESH
Question de :
M. Jean-Philippe Tanguy
Somme (4e circonscription) - Rassemblement National
M. Jean-Philippe Tanguy attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de l'autonomie et du handicap sur la situation toujours plus précaire des accompagnants des élèves en situations de handicap (AESH). Alors qu'elles représentent un véritable pilier dans l'accompagnement des enfants en situation de handicap dans les écoles, ces professionnelles, des femmes pour 93 % d'entre elles, sont confrontées à des moyens très limités. En effet, bien souvent, une AESH se voit dans l'obligation, faute d'effectifs suffisants, de s'occuper de plusieurs élèves dont la situation nécessite pourtant un accompagnement individualisé. Ainsi, à la rentrée 2024, de nombreux élèves en situation de handicap se sont retrouvés sans AESH et pour cause : pour près de 513 000 élèves en situation de handicap, seuls 132 000 AESH étaient disponibles. Cette situation génère une anxiété chez ces accompagnants qui, d'ailleurs, ne disposent pas toujours des moyens pour se former aux attentes de leur profession : s'ils doivent suivre soixante heures de formation obligatoire, ces dernières sont dispensées en ligne et, bien souvent, après l'entrée en poste. Au-delà des conditions de travail difficiles, c'est la question de la rémunération qui revient régulièrement parmi les revendications des AESH et notamment de l'association qui les représente, l'association AESH en Lumière. Dans son rapport sur l'inclusion scolaire des élèves en situation de handicap publié en septembre 2024, a notamment relevé le manque d'attractivité de la profession, lié à deux principaux facteurs, l'insuffisante reconnaissance salariale d'une part et la précarité de la fonction d'autre part. Il est néanmoins important de noter certaines avancées, telles que la possibilité d'accéder à un CDI renouvelable après trois années en contrat à durée déterminée. Pourtant, si des progrès ont été réalisés ces dernières années, 98 % des postes occupés demeurent à temps partiel pour 98 %, sans prise en compte de nombreuses tâches connexes réalisées par les AESH. Cette situation se traduit par un salaire avoisinant à peine les 900 euros net par mois. Ainsi, la hausse de la rémunération des AESH de 28 % entre 2020 et 2024 est largement insuffisante pour revaloriser une profession si cruciale pour l'inclusivité. Par ailleurs, les rencontres avec les parents et les enseignants, les conseils de classe, les heures passées à adapter les supports pour leurs élèves et à les accompagner dans la vie quotidienne, ainsi que, pour le second degré, les « trous » dans les emplois du temps des élèves, ne sont pas des heures prises en compte dans le calcul de la rémunération. Plus généralement, les AESH sont confrontés à une incertitude constante face à leurs droits, notamment quant à la personne de leur supérieur hiérarchique, souvent très absente voire inconnue. Cette situation de flou se retrouve également concernant l'articulation des fonctions et des missions des AESH, notamment vis-à-vis des enseignants, ce qui illustre parfaitement le manque d'institutionnalisation et d'encadrement de cette profession. Ces problèmes pourraient être en grande partie résolus si le statut de fonctionnaire était reconnu aux AESH, avec un recrutement par concours, qui permettrait de reconnaître à ces derniers la qualité de travailleur à temps plein, d'élever leur rémunération et ainsi de favoriser l'attractivité de la profession. C'est pourquoi il lui demande si le Gouvernement entend reconnaître le statut de fonctionnaire aux AESH, afin de répondre aux besoins de tous les élèves en situation de handicap.
Réponse publiée le 18 novembre 2025
Membres à part entière de la communauté éducative, les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sont des professionnels qui jouent un rôle essentiel dans l'accueil des élèves en situation de handicap à l'école. Le système scolaire français accueille près de 520 000 élèves en situation de handicap. Leur prise en charge connaît une croissance très élevée de 6 à 10 % par an. À la rentrée scolaire 2025, 2 000 créations de postes d'AESH en équivalent temps plein sont prévues en complément des 11 000 postes d'AESH qui ont été créés depuis la rentrée scolaire 2022 afin de répondre au mieux à l'augmentation des besoins d'accompagnement humain pour les élèves en situation de handicap. Ainsi, l'État poursuit son engagement fort et durable en faveur de l'inclusion, déjà bien ancrée, en l'accentuant par ces créations de postes supplémentaires. Face à la diversité des situations qui nécessitent chacune une réponse adaptée, la croissance du nombre d'AESH ne peut toutefois pas être la seule réponse aux besoins des élèves en situation de handicap. Les critères de notification, l'évaluation des besoins des élèves, les relations avec les maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ou encore la diversité des formes d'accompagnement sont autant de leviers sur lesquels le ministère chargé de l'éducation nationale agit. Le ministère est particulièrement attentif à l'amélioration de la rémunération des AESH, dont les missions sont essentielles au bon fonctionnement du service public de l'éducation. Plusieurs mesures ont été prises pour les revaloriser. Entre 2017 et 2025, la rémunération nette mensuelle d'un AESH a progressé en moyenne de 41 %, soit + 287 € nets par mois. Depuis 2023 et dans la continuité des précédentes mesures d'amélioration des conditions d'emploi et de rémunération des accompagnants des élèves en situation de handicap, une étape supplémentaire de leur revalorisation a été franchie : une grille indiciaire revalorisée, notamment avec un indice plancher supérieur au SMIC ; la création d'une indemnité de fonctions de 1 529 € bruts par an pour un AESH exerçant à temps complet ; une indemnité de sujétions d'un montant de 1 106 € bruts annuels pour les AESH exerçant dans une école ou un établissement relevant d'un réseau d'éducation prioritaire et une indemnité de sujétions de 3 263 € (part fixe) et d'un complément d'au plus 448 € (part modulable) pour les AESH exerçant dans une école ou un établissement relevant d'un réseau d'éducation prioritaire renforcé ; la majoration de 10 % de l'indemnité versée aux AESH référents qui apportent un appui méthodologique et un soutien spécifique aux AESH nouvellement nommés. Depuis 2022, les AESH adhèrant au dispositif de protection sociale complémentaire pour les agents publics bénéficient de 180 € bruts par an au titre du remboursement des cotisations. Depuis la rentrée 2023, les AESH peuvent accéder à un contrat à durée indéterminée (CDI) à l'issue d'un premier contrat de trois ans en cette qualité, contre six ans auparavant, conformément à la loi n° 2022-1574 du 16 décembre 2022 visant à lutter contre la précarité des accompagnants d'élèves en situation de handicap et des assistants d'éducation. Aujourd'hui, 63 % des AESH bénéficient ainsi d'un CDI. Les recrutements ainsi que la gestion des AESH sont, depuis le 1er janvier 2025, du seul ressort des services académiques. Ce transfert traduit l'objectif de mieux valoriser leurs fonctions et leur rôle au service de la réussite des élèves mais permet aussi l'accès pour les AESH concernés à de nouveaux droits en matière d'action sociale notamment. Le recrutement des AESH est lié à l'accompagnement d'un élève en situation de handicap pendant sa journée de classe. Il résulte de ce besoin que le temps de travail des AESH est en moyenne fixé à 24 heures d'accompagnement hebdomadaire. Le contrat des AESH précise le nombre d'heures d'accompagnement des élèves en situation de handicap à réaliser. Ce temps d'accompagnement s'effectue au cours des 36 semaines de classe de l'année scolaire. Le temps de service est calculé en multipliant la durée d'accompagnement hebdomadaire attendue pour chaque AESH, par un nombre de semaines de 41 à 45 semaines pour une année complète. La prise en compte d'un nombre de semaines supérieur aux 36 semaines de l'année scolaire permet de couvrir les activités connexes, qui viennent compléter les temps d'accompagnement. Ces activités sont adaptées en fonction de l'emploi occupé, et comprennent notamment la préparation des séances, les temps de réunion avec l'équipe éducative, la participation à des actions de formation en dehors du temps d'accompagnement et les temps d'information sur le handicap. Elles sont donc prises en charge dans la rémunération. À l'heure actuelle, dans la fonction publique de l'État, il n'est pas possible d'être recruté à temps incomplet en tant que fonctionnaire. Or, une majorité d'AESH exercent actuellement leurs fonctions à temps incomplet ; l'existence de temps incomplets résulte de l'activité exercée auprès des élèves, sans que celle-ci ne soit entièrement assimilable à celle d'un personnel enseignant soumis à des obligations de service tenant compte des sujétions particulières liées au service d'enseignement (préparation des cours, correction des devoirs). Les temps incomplets sont également liés aux possibles évolutions de l'activité, en fonction des notifications des MDPH. La création d'un corps engendrerait un processus de recrutement allongé et complexifié. La mise en place de concours déconcentrés au niveau régional aurait également un coût financier et logistique non négligeable et s'avérerait lourde à mettre en œuvre en gestion au vu des 15 500 néo-recrutements opérés chaque année pour cette population. En outre, une procédure de recrutement au niveau académique avec une affectation départementale n'offrirait aucune garantie pour les lauréats de ces concours d'être affectés au sein de l'école ou de l'établissement souhaité, ce qui pourrait impacter leur situation personnelle ou familiale. À l'heure actuelle, le recrutement organisé au niveau des directions des services départementaux de l'éducation nationale permet de garantir une affectation qui réponde aux besoins des élèves et au plus près des vœux des AESH. Depuis la rentrée scolaire 2024, il est proposé aux AESH qui le souhaitent d'augmenter leur quotité de travail en intervenant dans le cadre de la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne, conformément à la loi n° 2024-475 du 27 mai 2024. En matière de formation, ils bénéficient d'actions de formation sur le temps de service, mises en œuvre par les services académiques, en dehors du temps d'accompagnement de l'élève. Cette formation comprend un volet d'adaptation à l'emploi, en application de l'article 8 du décret n° 2014-724 du 27 juin 2014 relatif aux conditions de recrutement et d'emploi des accompagnants des élèves en situation de handicap. Les AESH non titulaires d'un diplôme professionnel dans le domaine de l'aide à la personne doivent bénéficier, au plus tard à la fin du premier trimestre de l'année scolaire, voire si possible, avant la prise de fonction, d'une formation d'adaptation à l'emploi de 60 heures, comprise dans leur temps de travail. L'objectif est de garantir aux AESH une formation leur permettant d'exercer leurs fonctions dans les meilleures conditions, le contenu devant donc être adapté autant que possible aux besoins de chaque agent. En outre, des actions de formation continue tendant au développement professionnel des agents sont proposées. Cette formation continue repose quant à elle sur un cahier des charges national. Elle est ensuite déclinée, au niveau local, dans les plans de formation académiques et départementaux. Les AESH peuvent se référer au guide national des AESH qui précise leurs droits en matière d'emploi, de rémunération, de contrat, des droits à congés et absences, des droits syndicaux et en matière de santé et de sécurité. Le ministère est déterminé à poursuivre l'amélioration des conditions de rémunération et de travail des AESH en permettant notamment à celles et ceux qui le souhaitent de bénéficier d'un contrat à temps complet.
Auteur : M. Jean-Philippe Tanguy
Type de question : Question écrite
Rubrique : Personnes handicapées
Ministère interrogé : Autonomie et handicap
Ministère répondant : Éducation nationale
Dates :
Question publiée le 15 juillet 2025
Réponse publiée le 18 novembre 2025