Question au Gouvernement n° 862 :
Hausse de la pauvreté

17e Législature

Question de : Mme Eva Sas
Paris (8e circonscription) - Écologiste et Social

Question posée en séance, et publiée le 9 juillet 2025


HAUSSE DE LA PAUVRETÉ

Mme la présidente . La parole est à Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas . Il est évidemment difficile de prendre la parole après cet hommage à notre collègue dont le décès soudain nous a toutes et tous touchés, et je voudrais ici à mon tour saluer sa mémoire.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances. L'Insee vient de publier son rapport sur les inégalités pour l'année 2023 et le verdict est tombé. La France a atteint son plus haut niveau de pauvreté depuis que l'indicateur existe. Elle compte désormais 12 millions de pauvres et 30 % des Français ont vu leur niveau de vie reculer. L'Insee vient ainsi mettre des chiffres sur ce que les Français vivent au quotidien : la difficulté à boucler les fins de mois, le travail qui ne permet plus de vivre correctement, l'abandon des personnes sans abri à leur sort.

Cet appauvrissement des plus modestes et des classes moyennes est le fruit de sept ans de macronisme : aucune volonté de lutter contre la pauvreté et une ubérisation de l'emploi qui se traduit par une baisse du niveau de vie des indépendants et des microentrepreneurs ainsi que par un développement des temps partiels.

De l'autre côté du spectre, le niveau de vie des plus riches a continué à augmenter grâce à vos largesses, notamment par la faible imposition des revenus du capital et la suppression de la taxe d'habitation pour les 20 % les plus aisés. Résultat : une forte hausse des inégalités, qui atteignent le même niveau que sous Nicolas Sarkozy.

Ma question sera donc double. Vous engagez-vous à faire enfin contribuer les plus riches, qui paient aujourd'hui moins d'impôts que les classes moyennes, en intégrant au budget 2026 l'impôt plancher sur la fortune, désormais soutenu par neuf prix Nobel d'économie ? Vous engagez-vous parallèlement à renoncer à tout gel des prestations sociales, à enfin agir pour le pouvoir de vivre des travailleurs modestes et à soutenir les politiques de sortie de la pauvreté, comme les territoires zéro chômeur de longue durée, le plan logement d'abord ou la présomption de salariat pour les travailleurs des plateformes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et GDR.)

Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics . Tout comme il est difficile de poser une question dans de telles circonstances, il est difficile d'y répondre. Je vous donnerai cependant quelques éléments d'information avant que le premier ministre ne présente, le 15 juillet prochain, les orientations du gouvernement pour relever le défi qui se présente à nous et qui dépasse largement les simples considérations budgétaires.

La France reste le pays le plus redistributif de l'OCDE puisque, avant transferts, les écarts de revenu constatés entre les plus pauvres et les plus aisés sont de un à dix-huit alors qu'ils ne sont plus que de un à trois grâce à notre système fiscal et aux dispositifs de redistribution monétaire et non monétaire. Ce sont les travaux de Jean-Marc Germain qui en attestent et ils doivent être considérés pour ce qu'ils sont.

Incontestablement, la Ve République est, depuis ses débuts, ancrée dans un modèle social qui fait notre force. Hélas, ce modèle est à présent fragilisé…

Mme Marie-Charlotte Garin . Par votre politique !

Mme Amélie de Montchalin, ministre . …par la dette et le déficit. Nous croyons cependant qu'il pourra être sauvé par le travail et l'entreprise.

Quand nous faisons du RSA un outil de retour au travail, en six mois, 42 % des personnes qui ont participé à l'expérimentation ont retrouvé un emploi. Nous croyons aussi à l'entreprise. Je l'ai déjà dit devant vous et nous en avons suffisamment débattu : nous ne pensons pas que faire partir les 1 800 entrepreneurs qui ont réussi à créer des emplois dans notre pays sera la réponse à nos problèmes. Le CAC40 représente 1,2 million d'emplois en France ; les 6 000 plus belles entreprises de taille intermédiaire de France, ce sont 4 millions d'emplois. (Mme Olivia Grégoire applaudit.) Ce sont ces emplois que nous devons développer.

Que pourrais-je vous dire en conclusion ? Oui, nous voulons un système social fort. Pour cela, nous avons besoin d'entreprises solides et d'un système fiscal efficace. Ma main ne tremble pas face à la fraude (M. Romain Daubié applaudit) et nous n'hésiterons pas davantage à inscrire dans la loi les mesures qui s'imposent pour lutter plus efficacement contre la suroptimisation fiscale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

Données clés

Auteur : Mme Eva Sas

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Pauvreté

Ministère interrogé : Comptes publics

Ministère répondant : Comptes publics

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 9 juillet 2025

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