Question écrite n° 8659 :
Compétence des CCI quant à la suspension/retrait de la carte d'agent immobilier

17e Législature

Question de : Mme Colette Capdevielle
Pyrénées-Atlantiques (5e circonscription) - Socialistes et apparentés

Mme Colette Capdevielle interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'absence de base juridique permettant aux chambres de commerce et d'industrie (CCI), compétentes pour délivrer les cartes professionnelles d'agent immobilier, de prononcer une suspension à titre conservatoire de cette carte, en cas de manquement graves aux obligations de la profession. Depuis la loi n° 2014-366 dite loi « ALUR », la compétence en matière de délivrance de la carte professionnelle d'agent immobilier a été transférée de l'autorité préfectorale aux CCI. Toutefois, cette évolution s'est faite sans leur reconnaître de véritable pouvoir de police administrative. L'article 86-1 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 dispose que « le ministère public avise sans délai le président de la chambre de commerce et d'industrie territoriale ou de la chambre départementale d'Île-de-France compétent en application du premier alinéa de l'article 5 de toute condamnation pénale prononcée contre un titulaire de la carte professionnelle et entraînant l'incapacité d'exercer les activités mentionnées à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970 susvisée ». Il semblerait donc que les CCI ne puissent prononcer de retrait de la carte professionnelle qu'en cas de condamnation pénale définitive laquelle entraînerait l'incapacité d'exercer les activités entrant dans le champ d'application de la loi « Hoguet ». Ainsi, dans certains territoires, notamment au Pays basque, des associations de protection des droits des locataires constatent des pratiques illégales commises par certaines agences immobilières (préavis postdatés, congés abusifs, etc.), dont les comportements sont sanctionnés par les tribunaux judiciaires. Ces agences bénéficient de la possibilité d'interjeter appel du jugement et du principe de la présomption d'innocence, garantie de l'État de droit. Toutefois, en l'absence de sanction administrative ou disciplinaire intermédiaire, ces professionnels peuvent continuer à exercer. Cette situation qui limite les possibilités d'action des CCI peut ainsi affaiblir la crédibilité de l'encadrement des professions immobilières dans un contexte où la question du logement est une préoccupation essentielle. Dans ce contexte, plusieurs pistes peuvent être envisagées, telles que l'introduction d'une compétence de suspension temporaire de la carte professionnelle par les CCI, sous le contrôle du juge administratif, notamment à la suite d'un manquement total ou partiel aux obligations incombant à l'agent immobilier. De même, un accès encadré et sécurisé des CCI aux informations judiciaires, y compris en l'absence de condamnation définitive, leur permettrait de pouvoir agir directement et en connaissance de cause. Elle souhaiterait donc savoir si le Gouvernement envisage de faire évoluer le cadre législatif en ce sens, afin de permettre aux CCI d'agir plus efficacement et plus rapidement pour protéger les consommateurs face aux pratiques illégales de certains professionnels de l'immobilier, tout en respectant les principes fondamentaux de l'État de droit.

Réponse publiée le 16 septembre 2025

Depuis l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) du 24 mars 2014, les présidents des chambres de commerce et d'industrie (CCI) ont été chargés, à la place des préfets, de la délivrance des cartes professionnelles. Ce transfert de compétence visait à simplifier la démarche administrative, à en améliorer l'efficacité, ainsi qu'à en assurer un suivi régulier. Les CCI contrôlent ainsi, au moment de la délivrance initiale et lors des renouvellements triennaux, plusieurs conditions d'exercice de la profession : l'aptitude professionnelle (diplôme ou expérience), la souscription à une garantie financière (pour les professionnels détenant des fonds), à une assurance responsabilité civile professionnelle, ainsi que le respect de l'obligation de formation continue. Elles vérifient enfin que le demandeur n'est pas frappé d'une incapacité ou interdiction d'exercer, en s'appuyant notamment sur le casier judiciaire du demandeur ainsi que sur les informations transmises par le ministère public. Outre cette vérification des conditions d'exercice à la profession, les CCI n'ont pas vocation à exercer des prérogatives de police administrative, domaine qui relève des la compétences de la Direction Générale de la Conccurence, de la Consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) dont les agents sont habilités à rechercher et à constater les infractions ou les manquements aux dispositions des titres Ier et III de la loi Hoguet conformément à l'article 511-7 du code de la consommation. La DGCCRF dispose à cet effet de pouvoirs étendus d'enquête et de sanction. En cas de manquements constatés, la DGCCRF peut notamment prononcer des amendes administratives, des mesures correctives et des injonctions contraignantes. Le non-respect de ces injonctions expose les professionnels à des sanctions importantes, pouvant atteindre deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende. Introduire dans la législation la possibilité pour les CCI de prononcer une suspension à titre conservatoire de la carte professionnelle n'apparaît pas proportionné au but poursuivi compte tenu des contrôles préventifs et répressifs qui existent déjà pour réguler le marché des activités immobilières. Ainsi, en l'état, un renforcement des mécanismes d'encadrement ne semble pas pertinente. Le dispositif existant, associant contrôles a priori (CCI) et contrôles a posteriori (DGCCRF), garantit une protection efficace des consommateurs tout en respectant les équilibres nécessaires à la liberté d'entreprendre.

Données clés

Auteur : Mme Colette Capdevielle

Type de question : Question écrite

Rubrique : Professions et activités immobilières

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Dates :
Question publiée le 15 juillet 2025
Réponse publiée le 16 septembre 2025

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