Question écrite n° 8750 :
Préservation de l'activité de cautionnement par sociétés de financement / Bâle

17e Législature

Question de : M. Jean-Paul Mattei
Pyrénées-Atlantiques (2e circonscription) - Les Démocrates

M. Jean-Paul Mattei appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'inquiétude de la société de financement Crédit Logement, qui permet depuis les années 1970 à de nombreux ménages d'accéder au logement grâce au cautionnement des prêts bancaires qu'elle propose, et qui couvre actuellement plus d'un tiers de l'ensemble des crédits immobiliers en cours avec 420 milliards d'euros de prêts garantis. Ce système original, spécifiquement français, constitue une véritable alternative sociale aux hypothèques bancaires qui existent dans les pays anglo-saxons et exposent les ménages à des saisies brutales et rapides de leurs biens en cas de difficulté. En effet, la garantie hypothécaire est économiquement moins efficace que le cautionnement proposé par Crédit logement car présentant plus de risque de défaut, des pertes plus élevées, des coûts opérationnels supérieurs, un traitement moins favorable dans les stress-tests de l'autorité bancaire européenne ou encore une incapacité à mutualiser les risques climatiques, suivant le rapport annuel sur l'habitat de l'autorité de contrôle prudentiel et de régulation (ACPR). L'application directe des normes bancaires et prudentielles introduites par l'application des accords de Bâle III publiées au journal officiel de l'Union européenne le 19 juin 2024 et entrées en vigueur le 1er janvier 2025 et leur application en droit français par l'ordonnance n°2020-1636 du 21 décembre 2020, prise sur habilitation de la loi PACTE, et la loi de ratification N°2021-175 du 22 février 2021 semble menacer aujourd'hui le modèle économique du cautionnement des prêts bancaires par Crédit logement. En effet, alors que les banques sont déjà concernées par l'application de la règle européenne de plancher de fonds propres en capital lorsqu'elles attribuent des crédits immobiliers, l'application pure et simple de cette réglementation prudentielles aux sociétés de financement agréées telles Crédit Logement, qui ne sont pas des banques et ne sont pas supervisées par la Banque centrale européenne mais par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) conduirait à imposer une redondance dans le plancher de fonds propres injustifiée, puisque souscrite une première fois par la banque éditrice de l'offre de prêt lors de la souscription dudit crédit, et une seconde fois pour le même prêt si on imposait la même règle de plancher de fonds propres à l'organisme de cautionnement. Cette double exigence qui pèserait sur les seuls organismes de cautionnement risquerait de conduire à la disparition pure et simple de ce modèle original et social typiquement français, à un horizon très proche, avec les impacts induits par le recours exclusif à l'hypothèque et à ses issues brutales pour les souscripteurs. En effet, ces exigences conduiraient Crédit logement à devoir mettre en réserve d'ici 2033 des fonds propres complémentaires de 6 milliards d'euros, ce qui ne pourrait pas être supporté par le modèle d'affaire de Crédit logement (ni via l'augmentation de la tarification, ni via une augmentation de capital). Le régime prudentiel spécifique auquel obéit Crédit logement, et qui concerne l'ensemble des sociétés de financement agréées, relève d'une réglementation nationale aujourd'hui organisée par l'arrêté du 23 décembre 2013 relatif au régime prudentiel des sociétés de financement, n°NOR : EFIT1330635A, paru au Journal officiel n° 0301 du 28 décembre 2013. La spécificité de l'intervention du cadre réglementaire national pour cette activité vient du fait que les sociétés de financement agréées ne sont pas assujetties au ratio de liquidité à court terme (LCR), au ratio structurel à long terme (NSFR) ou au levier induits par les accords de Bâle III et peuvent classer en fonds propres admis par l'outil de mesure de solvabilité bancaire dénommé « CET1 » un fonds de garantie répondant à certaines conditions limitatives fixées par cet arrêté. Compte-tenu de l'impossibilité pour le modèle économique de Crédit logement de faire face à des exigences accrues de fonds propres qui constitueraient également une forme d'inégalité de traitement par rapport à d'autres organismes comme les cautions d'assurances, en plus de représenter une précaution de solvabilité redondante et superflue car déjà satisfaite au stade de l'édition des offres de prêt par les banques, il lui demande de lui indiquer si le Gouvernement est conscient de ce problème et dans quel délai et de quelle manière il entend adapter la réglementation pour éviter que les activités de cautionnement de Crédit Logement ne disparaissent en raison d'une inégalité de traitement entre acteurs économiques. Il lui demande notamment de préciser s'il entend exempter de l'exigence de plancher de fonds propres Crédit Logement et les sociétés de financement agréées similaires, comme c'était le cas auparavant pour le plancher de fonds propres exigé par Bâle I et dont l'ACPR avait dispensé Crédit logement. Dans le cas contraire, il lui demande de lui indiquer de quelle façon et dans quels délais il entend prendre les dispositions réglementaires appropriées afin que le modèle économique de Crédit logement ne disparaisse pas, sans générer de distorsion de concurrence avec d'autres acteurs du secteur, compte-tenu de son utilité sociale pour les Français.

Données clés

Auteur : M. Jean-Paul Mattei

Type de question : Question écrite

Rubrique : Banques et établissements financiers

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Date :
Question publiée le 22 juillet 2025

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