Renforcement urgent des moyens aériens contre les feux de forêt en France
Question de :
M. Sébastien Chenu
Nord (19e circonscription) - Rassemblement National
M. Sébastien Chenu alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur sur l'inadéquation persistante des moyens aériens déployés dans le cadre de la lutte contre les feux de forêt sur le territoire national. Dès le printemps 2025, plusieurs incendies ont été signalés sur différents points du territoire, notamment à Bonifacio, Mandelieu-la-Napoule, dans l'Aude ou encore en Dordogne. Ces départs de feu précoces laissent présager une saison estivale à haut risque. À cela s'ajoute un incendie survenu le lundi 7 juillet 2025 dans l'Aude, près de Narbonne, et ayant parcouru 2 000 hectares selon les pompiers. Trois autres départements du sud de la France ont par ailleurs été placés en vigilance rouge. Pour mémoire, plus de 23 000 hectares de végétation ont été détruits en 2024, contre 16 000 en 2023 et 72 000 en 2022. Ces incendies ont, à plusieurs reprises, mis à l'épreuve l'efficacité du dispositif national. L'été 2022, notamment, a été marqué par des sinistres majeurs en Gironde, avec des évacuations massives, la destruction de sites touristiques et le recours d'urgence à des moyens européens dans le cadre du mécanisme RescEU. Ces épisodes avaient révélé les limites de la flotte nationale, en particulier la faible disponibilité de plusieurs Canadairs immobilisés pour maintenance, obligeant à des arbitrages contraints dans les interventions. Trois ans plus tard, la flotte française se compose toujours de douze avions bombardiers d'eau de type Canadair, dont la disponibilité opérationnelle reste irrégulière. Le Président de la République avait pourtant annoncé un renforcement à seize appareils d'ici la fin du quinquennat, mais cette montée en puissance ne devrait pas être effective avant 2027. Dans ce contexte, M. le député demande au Gouvernement quelles mesures concrètes et immédiates seront prises pour garantir une couverture aérienne suffisante dès l'été 2025. Il lui demande également si de nouvelles acquisitions d'appareils sont envisagées et si le Gouvernement entend poursuivre sa stratégie actuelle, reposant majoritairement sur des appuis extérieurs via le mécanisme européen RescEU, ou s'il prévoit au contraire un renforcement durable, autonome et national du dispositif français de lutte contre les feux de forêt.
Réponse publiée le 16 décembre 2025
Les moyens de lutte contre les feux de forêts, qu'ils soient terrestres ou aériens, font l'objet d'une attention particulière de la part du ministre de l'intérieur. Ils doivent être dimensionnés pour faire face aux risques croissants liés au réchauffement climatique. À court terme, la flotte de la sécurité civile fait l'objet d'une attention particulière pour assurer sa disponibilité opérationnelle et garantir la sécurité des personnels navigants. Le niveau de disponibilité des aéronefs durant la saison feux 2025 a été très satisfaisant. Comme cela a été rapporté par les médias, ils ont été engagés massivement et dans la durée sur tous les feux de grande ampleur comme ceux intervenus notamment dans les Bouches-du-Rhône et dans l'Aude. Cette disponibilité est le résultat d'un plan débuté dès l'automne 2024 pour permettre d'anticiper les pannes récurrentes et les fragilités des appareils, par la mise en œuvre d'un plan de maintenance préventif pendant la saison hivernale. Ce plan a porté également sur le renforcement des moyens humains du prestataire de la maintenance et sur le renforcement des liens avec le constructeur des Canadairs pour permettre un meilleur approvisionnement en pièces détachées. Il est par ailleurs précisé que la stratégie de lutte contre les feux de forêts par les moyens aériens ne repose pas que sur la flotte des Canadairs. En effet, il convient de rappeler que depuis 2022, la sécurité civile complète ses moyens patrimoniaux par des locations d'aéronefs (hélicoptères bombardiers d'eau et avions bombardiers). Ainsi, en 2025, 39 aéronefs sont dédiés à la lutte contre les feux de forêts. Aux 12 Canadairs, 8 Dash et 3 BEECH de la sécurité civile, se sont ajoutés 6 hélicoptères lourds, 4 hélicoptères légers et 6 avions légers d'une capacité de largage de 3 tonnes. Cette flotte a pour vocation d'être prépositionnée au plus près des dangers, tout en conservant une capacité d'attaque massive d'éventuels feux en extension. Comme en 2024, la location de ces vecteurs supplémentaires représente cette année un effort financier de l'État de plus de 24 millions d'euros. À moyen et long terme, la réflexion stratégique menée par la DGSCGC concernant les moyens aériens porte sur la définition en cours d'un contrat opérationnel tenant compte de l'augmentation du risque. Il en découlera la définition d'une réponse capacitaire dont l'ambition est de formater une flotte aérienne selon les niveaux de risques anticipés à l'horizon 2035 et au-delà. Ce travail vise notamment à déterminer la typologie et le nombre de vecteurs aériens qui nous seront nécessaires à l'horizon 2035 et 2050 suivant des hypothèses d'extension multidimensionnelle du risque d'incendie de forêt (extension géographique et temporelle, et augmentation de la puissance des feux) et des différents paramètres météorologiques comme l'évolution des précipitations, l'évolution des températures et de la sécheresse …). Dans ce contexte, il convient de rappeler que les deux Canadairs commandés dans le cadre du dispositif européen Rescue sont attendus en 2028 selon les prévisions récemment confirmées par l'industriel De Haviland Canada. De plus, la commande de deux nouveaux appareils pourra être lancée l'année prochaine malgré les contraintes budgétaires, à condition que le PLF 2026 soit adopté. Toutefois, c'est bien à l'aune des travaux précités sur l'adéquation des moyens aux risques, que devra être préparé un programme d'acquisition. Dans ce cadre, les projets d'avions nouveaux en cours de développement, concurrents ou complémentaires du Canadair pourront d'ailleurs être pris en compte. Il convient, par ailleurs, de rappeler que la construction d'un avion bombardier d'eau amphibie répond à des exigences techniques incompatibles avec une perspective de livraison à court terme et ceci est d'autant plus vrai pour les projets innovants dont l'incubation est estimée à plusieurs années. La DGSCGC opère une veille stratégique et technologique, maintenant un contact étroit avec l'ensemble des porteurs de projets européens connus à ce jour, et plus particulièrement les sociétés françaises. L'étude des projets alternatifs permettra de décider s'il est opportun de continuer sur le « tout Canadair » ou de diversifier nos moyens pour être plus efficace face aux enjeux climatiques, tout en récupérant une souveraineté européenne souhaitable dans le domaine de la production de tels avions. Toutefois, à ce stade il s'agit de projets qui nécessitent, pour leur très grande majorité, de financements privés et publics substantiels.
Auteur : M. Sébastien Chenu
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sécurité des biens et des personnes
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 22 juillet 2025
Réponse publiée le 16 décembre 2025