Question de : M. Éric Woerth
Oise (4e circonscription) - Ensemble pour la République

M. Éric Woerth attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur les récentes décisions impactant les chasseurs de gibier d'eau. La Commission européenne a mis en place un groupe de travail (NADEG) chargé d'évaluer la durabilité des prélèvements d'oiseaux migrateurs chassés à l'échelle européenne. Bien que certaines données n'aient pas été pleinement prises en compte, les experts consultés ont rendu leurs conclusions en avril 2025. Sur les 33 espèces étudiées, seuls trois – le fuligule milouin, la caille des blés et le canard siffleur – nécessitent, selon eux, une gestion adaptative. Aucune interdiction immédiate n'a été recommandée. Pourtant, lors du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS) du 26 juin 2025, le ministère a proposé un moratoire sur le fuligule milouin ainsi qu'une réduction des périodes de chasse pour six autres espèces, dont certaines non concernées par l'étude européenne, comme le lagopède alpin. Ces mesures suscitent l'incompréhension des chasseurs, qui dénoncent des décisions déconnectées des réalités de terrain et en décalage avec les recommandations scientifiques européennes. Les chasseurs de gibier d'eau jouent un rôle actif dans la préservation de la biodiversité, notamment par l'entretien des zones humides. La gestion durable des espèces migratrices ne peut se faire sans leur implication. Aussi, il souhaite savoir si le Gouvernement entend s'appuyer pleinement sur les travaux des experts européens et aligner ses décisions sur leurs préconisations en matière de gestion des espèces d'oiseaux migrateurs.

Réponse publiée le 2 décembre 2025

La France participe activement aux travaux du NADEG (Nature Directives Expert Group), groupe d'experts de l'Union européenne institué par la Commission européenne pour suivre la mise en œuvre des directives Oiseaux et Habitats, composé des autorités nationales des différents Etats-membres ainsi que des représentants des chasseurs d'une part et des associations de protection de la nature d'autre part. En 2021, une Task Force for the Recovery of Birds (TFRB) a été constituée au sein du NADEG, avec pour mission d'analyser la durabilité de la chasse de 33 espèces d'oiseaux migrateurs, la durabilité des espèces sédentaires relevant de la responsabilité des Etats membres.  Les conclusions scientifiques, présentées le 8 novembre 2024, ont identifié sept espèces comme présentant un risque élevé de non-durabilité de la chasse. Pour quatre d'entre elles (fuligule milouin, canard siffleur, caille des blés, grive mauvis), un moratoire immédiat a été recommandé par la Commission européenne sur proposition de la task force, dans l'attente de la mise en place d'une gestion adaptative. Pour trois autres (sarcelle d'hiver, canard souchet, canard pilet), une réduction des prélèvements de moitié a été préconisée. Ces propositions visent à assurer la conformité des pratiques avec l'article 7 de la directive Oiseaux. En effet, pour une espèce migratrice, les observations nationales peuvent différer des observations européennes. C'est bien au niveau supra-national que l'action est pertinente pour préserver l'espèce.  Dans un courrier aux membres du groupe NADEG, la Commission européenne a confirmé en juin dernier que la prise de mesures conservatoires concernant ces 7 espèces était attendue dès la saison 2025/2026 en parallèle d'autres actions en faveur des habitats dans l'attente de la mise en place d'un modèle de gestion adaptative pour 3 d'entre elles prévu à l'automne. Sur la base de ces éléments, le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS) s'est réuni le 16 juillet dernier et a voté l'instauration de plafonds de prélèvements pour la caille des blés d'une part, et pour les canards de surface, fuligules, macreuses, garrots et nettes. Il s'est également prononcé sur la prolongation d'un an des moratoires concernant la barge à queue noire et le courlis cendré, et la mise en place d'un moratoire de 5 ans pour l'eider à duvet en danger critique d'extinction sur le territoire métropolitain. Ce dispositif s'accompagne de l'obligation de déclaration des prélèvements pour l'ensemble des anatidés (à l'exception du canard colvert et des oies). Ces mesures permettent de répondre à la fois à la demande de la Commission européenne de réduction de la pression de chasse ainsi qu'au besoin d'avoir de meilleures connaissances, indispensables pour apprécier la situation réelle de chaque espèce à l'échelle biogéographique.  Par ailleurs, en raison de son état de conservation préoccupant, le fuligule milouin sera intégré à la liste nationale des espèces soumises à gestion adaptative dès cette année afin d'adapter la pression de chasse à l'état de la population.  Compte tenu d'une progression de la population pour la tourterelle des bois de 40% depuis 2021 en Europe après plusieurs années de moratoire, la réouverture à la chasse de la tourterelle des bois a été votée avec un quota de 10 560 oiseaux pour la saison 2025-2026, dans le cadre d'une gestion adaptative européenne. Ce résultat témoigne de l'efficacité d'une approche fondée sur la connaissance, la concertation et l'engagement partagé. Ce modèle a vocation à être étendu, y compris pour d'autres espèces comme le canard siffleur, la caille des blés ou le fuligule milouin, à partir de 2026. Ce cadre vise à assurer la viabilité des populations d'oiseaux migrateurs tout en reconnaissant le rôle important joué par les chasseurs dans la gestion et la préservation des milieux. Il s'agit d'une approche évolutive, qui sera ajustée en fonction des connaissances scientifiques disponibles et des échanges européens à venir. Le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour que la régulation cynégétique repose sur des données partagées, une concertation transparente et une exigence de durabilité, à l'échelle tant nationale qu'européenne. La préservation de la biodiversité et la durabilité des pratiques cynégétiques sont des priorités constantes du Gouvernement, qui veille à concilier exigences écologiques et respect des traditions rurales.

Données clés

Auteur : M. Éric Woerth

Type de question : Question écrite

Rubrique : Chasse et pêche

Ministère interrogé : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Ministère répondant : Transition écologique

Dates :
Question publiée le 29 juillet 2025
Réponse publiée le 2 décembre 2025

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