Impact de la fast fashion sur le secteur textile français
Question de :
M. René Lioret
Côte-d'Or (5e circonscription) - Rassemblement National
M. René Lioret attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'impact croissant de la fast fashion sur le commerce de proximité et les enseignes françaises du secteur de l'habillement. Depuis plusieurs années, le secteur du textile français est confronté à une concurrence féroce de la part de plateformes en ligne et d'enseignes internationales de fast fashion, qui inondent le marché français de vêtements à bas prix, produits en masse dans des conditions sociales et environnementales souvent opaques. Cette concurrence déséquilibrée fragilise profondément le tissu commercial national, en particulier les commerces indépendants et les enseignes historiques, qui peinent à rivaliser face à des pratiques de prix cassés et à la multiplication de collections renouvelées à un rythme effréné. Les représentants des enseignes françaises alertent sur les risques de désertification commerciale des centres-villes, la disparition d'emplois locaux non délocalisables et l'érosion d'un savoir-faire français qui fait partie intégrante du patrimoine économique du pays. Ils dénoncent également la distorsion de concurrence créée par l'importation massive de vêtements à très faible coût, souvent affranchis des mêmes contraintes fiscales, sociales et environnementales que les entreprises françaises. Dans ce contexte, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour rétablir des conditions de concurrence équitables entre les acteurs français et étrangers de la filière textile, soutenir les enseignes nationales face à la fast fashion et préserver l'emploi ainsi que le commerce de proximité sur l'ensemble du territoire. Il souhaite également savoir si une réflexion est engagée sur la mise en place de nouvelles régulations, telles qu'une taxation spécifique ou des obligations accrues de transparence sur les conditions de production, afin de protéger le secteur français de l'habillement et ses emplois.
Réponse publiée le 16 septembre 2025
Limiter les impacts délétères de la fast fashion sur l'emploi et l'environnement est précisément l'objet de la proposition de loi relative à la « mode ultra éphémère », récemment adoptée par le Sénat et qui donnera lieu à un examen par la commission mixte paritaire à l'automne prochain. Entre-temps, la commission européenne aura pu faire connaître son avis sur ce texte. Plus généralement, et pour ce qui concerne les mesures à la main du pouvoir règlementaire, le Gouvernement est pleinement engagé pour garantir aux entreprises des conditions de concurrence loyale. C'est pour cette raison qu'il a demandé, fin 2022, à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) l'ouverture d'une enquête sur les pratiques commerciales de SHEIN et d'autres enseignes pratiquant la fast fashion. L'objectif est de s'assurer que ces entreprises respectent toutes les exigences en matière de protection et d'information du consommateur. Cette enquête vient d'aboutir à la condamnation de la société ISEL (maison mère de SHEIN) à une amende de 40 millions d'euros pour « pratiques commerciales trompeuses », pour avoir majoré certains prix avant de leur appliquer une réduction, ou ne pas avoir tenu compte des promotions précédentes lorsqu'elle indiquait un prix de référence. La DGCCRF poursuit ses investigations sur les autres plateformes de fast-fashion qui font également l'objet d'une grande vigilance. Au-delà de l'enjeu de garantir à l'ensemble des opérateurs économiques des conditions de concurrence loyales et non faussées, le Gouvernement partage également les préoccupations environnementales et sociales évoquées. C'est pourquoi, il convient de veiller à ce que toutes les grandes entreprises qui opèrent au sein du marché intérieur soient soumises aux mêmes règles, et que les moins-disantes en matière de standards sociaux et environnementaux n'en tirent pas un avantage compétitif indu. Dans cette optique, plusieurs initiatives sont en cours d'élaboration au niveau européen pour mieux réguler l'industrie textile et l'habillement, sur lesquelles la France est particulièrement engagée : Le projet de directive « green claims » vise à mieux encadrer et justifier les allégations environnementales mises en avant par les producteurs, afin de mieux orienter les consommateurs vers des produits réellement vertueux et responsables ; Le projet d'acte délégué « textiles » du règlement ESPR permettra de renforcer l'écoconception des produits et l'information du consommateur sur les caractéristiques environnementales des produits textiles (passeport digital produit, mention de l'impact carbone du produit, renforcement de la traçabilité vis-à-vis du consommateur, …). Le projet de révision de la directive cadre sur les déchets visera à instaurer une filière à responsabilité élargie des producteurs sur les textiles, linge et chaussures dans tous les Etats-membres. La France est pionnière en la matière, puisqu'elle dispose depuis 2009 d'une filière de gestion des déchets textiles (REP TLC). En outre, le Gouvernement a, en concertation avec les acteurs de la filière, mené des travaux d'élaboration d'une méthodologie d'affichage environnemental des textiles, permettant de distinguer les productions responsables, domaine dans lequel l'industrie française excelle particulièrement. La méthodologie française prend ainsi en compte les pratiques de la mode éphémère au sein d'un indice de durabilité extrinsèque. L'affichage environnemental sera volontaire dans un premier temps, puis rendu obligatoire. Enfin, dans le cadre de la stratégie nationale de décarbonation et de réindustrialisation verte, le Gouvernement mobilise l'ensemble de la filière pour favoriser une mode éco-responsable et fabriquée en France, notamment à travers le financement des comités professionnels de développement économique (CPDE) de la filière. Les nombreuses actions engagées par ces CPDE sur les sujets sociaux et environnementaux sont également précisées au sein de leur contrat d'objectifs et de performance signé avec l'État et dans le cadre du Contrat stratégique mode & luxe.
Auteur : M. René Lioret
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 29 juillet 2025
Réponse publiée le 16 septembre 2025