Question écrite n° 909 :
Inégalité devant l'impôt pour les conjoints survivants

17e Législature

Question de : Mme Alexandra Masson
Alpes-Maritimes (4e circonscription) - Rassemblement National

Mme Alexandra Masson attire l'attention de M. le ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics, sur la situation fiscale de deux couples de personnes mariées ayant fait pour l'un, antérieurement à 2006, une donation au dernier vivant et pour l'autre un testament prévoyant que le conjoint survivant héritera de la totalité de l'usufruit. Dans l'une des successions, il est mentionné qu'elle est régie par l'article 757 du code civil ; dans la seconde, qu'elle est régie par l'article 1094-1 du même code. Quelle que soit l'option choisie, les droits sur les biens revenant au conjoint survivant sont rigoureusement identiques. Cependant, en matière d'impôt sur la fortune immobilière (IFI), dans la première hypothèse, le conjoint survivant doit déclarer la valeur de l'usufruit dans les proportions fixées par l'article 669 du code général des impôts (CGI) (en l'occurrence 30 %), alors que dans la seconde hypothèse, le conjoint survivant doit déclarer la valeur en pleine propriété du bien (100 %). Mme la députée interroge M. le ministre sur une inégalité devant l'impôt dans la mesure où deux contribuables placés exactement dans la même situation juridique au regard des droits qu'ils détiennent sur leurs biens, se voient imposés à l'IFI de deux façons différentes et ne payent pas le même impôt. Elle lui demande si on ne peut pas envisager que les conjoints survivants, simplement titulaire d'un droit d'usufruit résultant du décès de leur conjoint, soient traités également quelles que soient les dispositions à l'origine de leur droit d'usufruit.

Réponse publiée le 1er avril 2025

Le premier alinéa de l'article 968 du code général des impôts (CGI) prévoit que les actifs mentionnés à l'article 965 du CGI grevés d'usufruit sont, sauf exceptions, compris, au titre de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI), dans le patrimoine de l'usufruitier pour leur valeur en pleine propriété. Ce principe tire les conséquences des règles du droit civil selon lesquelles l'usufruitier est tenu d'assumer les charges afférentes aux biens dont il a la jouissance en application de l'article 582 du code civil. Le nu-propriétaire, qui ne tire pour sa part aucun revenu ou avantage immédiat des biens qu'il possède, n'a, en contrepartie, rien à déclarer au titre de l'IFI. Par exception, et à condition que le droit d'usufruit ne soit ni vendu ni cédé à titre gratuit par son titulaire, les actifs imposables dont la propriété est démembrée sont compris, respectivement, dans les patrimoines de l'usufruitier et du nu-propriétaire suivant les proportions fixées par l'article 669 du CGI lorsque le démembrement de propriété trouve sa source directe dans la loi. Le 1° de l'article 968 du CGI prévoit ainsi une imposition partagée entre le nu-propriétaire et l'usufruitier si le démembrement de propriété résulte notamment de l'application des dispositions de l'article 757 du code civil relatif à l'usufruit du conjoint survivant lorsque l'époux prédécédé laisse des enfants ou descendants. En revanche, le même 1° précise que les biens dont la propriété est démembrée en application de l'usufruit conventionnel prévu par l'article 1094-1 du code civil ne peuvent faire l'objet de cette imposition répartie et doivent être compris dans le patrimoine de l'usufruitier en pleine propriété. Ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2017-758 DC du 28 décembre 2017, la différence de traitement instituée par ces dispositions repose sur une différence de situation selon que l'usufruit, soit, est constitué par détermination de la loi, soit, procède d'une convention ou d'un testament. Elle résulte de la volonté du législateur de faire peser sur l'usufruitier la charge de l'IFI lorsque celui-ci était le plein propriétaire initial du bien immobilier et que le démembrement procède de sa volonté, et, au contraire, de faire peser cette charge sur l'usufruitier et le nu-propriétaire à hauteur de la valeur de l'usufruit et de la nue-propriété dans les autres situations. La différence d'imposition des biens dont la propriété est démembrée en fonction du fondement juridique du démembrement, issue de l'article 968 du CGI, est donc fondée sur des critères objectifs et rationnels, en rapport avec le but que le législateur s'est assigné et ne porte pas atteinte au principe constitutionnel d'égalité. Aussi n'est-il pas envisagé de modifier ces règles.

Données clés

Auteur : Mme Alexandra Masson

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôt sur la fortune immobilière

Ministère interrogé : Budget et comptes publics

Ministère répondant : Comptes publics

Dates :
Question publiée le 15 octobre 2024
Réponse publiée le 1er avril 2025

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