Question écrite n° 9182 :
Financement de la viticulture extra-européenne en période de crise viticole UE

17e Législature

Question de : Mme Caroline Colombier
Charente (3e circonscription) - Rassemblement National

Mme Caroline Colombier interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les récentes décisions de la Commission européenne concernant l'octroi de financements à la filière viticole sud-africaine, dans un contexte de crise profonde du secteur vitivinicole européen et particulièrement français. La Commission européenne a annoncé soutenir la viticulture sud-africaine pour un montant total de 15 millions d'euros, dans le cadre du programme de développement intitulé « Inclusive Wine Value Chain Development Programme », financé sur le budget de l'Union. Ce programme vise à soutenir le développement d'entreprises viticoles en Afrique du Sud notamment sur des critères explicitement fondés sur la composition raciale de l'actionnariat. Conformément aux termes publiés par South Africa Wine et relayés par la Commission, les 10 millions d'euros alloués au développement économique sont exclusivement destinés à des entreprises dont l'actionnariat est détenu au moins à 51 % par des « Noirs sud-africains », dans le cadre d'une politique dite de transformation raciale ou « Black Economic Empowerment (BEE) ». Les 5 millions d'euros restants sont destinés à la promotion et la distribution internationale des vins issus de ces exploitations. Cette décision intervient alors que la filière viticole européenne – et en particulier française – traverse une crise majeure, marquée par une chute continue de la consommation, un effondrement de la production (23 % en France entre 2023 et 2024) et des mesures d'urgence telles que des plans d'arrachage de vignes (27 500 hectares prévus en 2025) et d'autorisations de distillation de crise. Dans ce contexte, des voix s'élèvent pour s'interroger sur la pertinence d'un financement communautaire à destination d'une filière concurrente et d'un État extra-européen, fondé par ailleurs sur des critères d'éligibilité qui seraient illégaux s'ils étaient appliqués dans un État membre de l'Union et notamment la France, puisque basé sur un critère racial. C'est pourquoi elle lui demande la position du Gouvernement sur ces subventions européennes accordées à des producteurs extra-européens en période de crise interne, si le Gouvernement entend défendre la filière vitivinicole française auprès de la Commission et enfin s'il entend proposer une réallocation de ces fonds au bénéfice des producteurs français et européens en difficulté. Par ailleurs, elle l'interroge sur la position du Gouvernement quant à la possibilité d'user des fonds du contribuable français et européen pour financer des programmes fondés sur le critère racial, en contradiction complète avec les valeurs de la République et la législation nationale.

Réponse publiée le 2 décembre 2025

L'Inclusive Wine Value Chain Development Programme découle de l'accord de Partenariat économique agrée entre l'UE et les pays membres de la Communauté de développement de l'Afrique australe ratifié en 2016. Cet accord, permet un accès réciproque aux marchés dans de meilleures conditions commerciales, principalement dans les domaines de l'agriculture et la pêche (vin, sucre, fleurs et fruits en conserve). Dans le cadre de cet accord, qui a bénéficié aux exportations européennes, un Fonds européen pour les vins et spiritueux a été instauré. Ce fonds a été doté de 15 millions d'euros pour encourager transformation du secteur viticole sud-africain. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a pleinement conscience de l'importance du secteur viticole, qui contribue à hauteur de 130 milliards d'euros au PIB de l'Union européenne (UE). En 2024, les exportations de vins et spiritueux français ont atteint 15,6 milliards d'euros. Ce secteur contribue également au soutien social en générant un total d'environ 500 000 emplois directs et indirects, qui redynamisent les zones rurales françaises confrontées au dépeuplement. Nous savons également combien l'économie viticole a été mise en difficulté par le contexte d'incertitude commerciale et par la multiplication des évènements climatiques désastreux, dont les feux récents qui ont ravagé le territoire français. Face à la crise du secteur, il est important que la Commission européenne propose des solutions pérennes pour l'avenir de la politique vitivinicole européenne. Le ministre délégué chargé de l'Europe a écrit en ce sens au Commissaire Christophe HANSEN. Le Gouvernement continue de porter les intérêts des viticulteurs français au niveau européen au travers de notre soutien à une adoption rapide du paquet vin présenté par la Commission européenne le 28 mars 2025. Ce paquet vise à renforcer la résilience de la filière viticole face à ces nouveaux défis. Il s'inscrit dans la continuité des recommandations du Groupe de haut-niveau formulées en décembre 2024, que les autorités françaises ont soutenues. En matière d'arrachage, le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a mis en œuvre en 2024-2025 une aide à hauteur de 120 millions d'euros, à laquelle l'ensemble des vignobles français étaient éligibles. Cela a été discuté entre la ministre chargée de l'agriculture et les représentants de la filière viticole le 15 juillet dernier.  Enfin, il convient de rappeler que la filière viticole française dispose d'une enveloppe de près de 270 millions d'euros de crédits européens de la Politique agricole commune (FEAGA), chaque année, pour financer les interventions de son plan stratégique.A cet égard, la déclaration commune UE-Etats-Unis, publiée le 21 août 2025, a malheureusement confirmé que l'obtention d'exemptions des droits de douanes pour les vins et spiritueux n'a pas été obtenue jusqu'à présent, mais elle ne ferme pas la porte à une telle possibilité à l'avenir. L'exonération de droits de douane pour le secteur demeure l'une des priorités de la France dans cette négociation, et le Gouvernement continuera de porter cette demande. Ainsi, le soutien apporté aux viticulteurs français est sans commune mesure au soutien apporté aux viticulteurs de pays tiers.

Données clés

Auteur : Mme Caroline Colombier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 5 août 2025
Réponse publiée le 2 décembre 2025

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