Crise que traverse la filière de l'apiculture
Question de :
M. Joël Aviragnet
Haute-Garonne (8e circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Joël Aviragnet attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur la crise que traverse la filière de l'apiculture. Aujourd'hui, l'apiculture est confrontée à des bouleversements sans précédents. Aux côtés des équilibres naturels menacés, c'est la filière qui est en péril. L'accumulation de problèmes depuis plus de dix ans donne lieu à une crise multifactorielle : frelons asiatiques, parasites, dérèglement climatique et concurrence déloyale fragilisent la filière et pourraient conduire à sa disparition si aucune action n'était menée. Deux actions doivent être mises en œuvre urgemment pour soutenir les apiculteurs. Tout d'abord la lutte contre le frelon asiatique. Le frelon est un prédateur invasif menaçant la biodiversité en s'attaquant autant aux abeilles domestiques qu'aux insectes sauvages. Un seul nid de frelons consomme 11 kg d'insectes par an, dont seulement 30 % d'abeilles domestiques. La non-catégorisation du frelon asiatique au niveau européen par la nouvelle loi de santé animale n'exonère pas l'État d'une implication auprès des apiculteurs dans la gestion de ce prédateur et des dégâts qu'il occasionne. Les professionnels demandent, à juste titre, un appel à projet national de recherche fondamentale propice à l'émergence de solutions réellement efficaces contre cette espèce invasive. En attendant cette action sur le long terme, il paraît primordial de mettre en place un régime d'aide d'urgence pour compenser les pertes économiques liées à la prédation du frelon asiatique. Ensuite, l'interdiction des miels chinois en Europe. Il est de notoriété publique que la Chine inonde le marché mondial avec du faux miel coupé avec du sucre. 68 000 tonnes rentrent sur le marché européen. Certains pays comme la Belgique et l'Espagne sont les points d'entrée principaux de ces miels chinois sur le marché européen, ce qui rend toute restriction nationale inopérante. Ces miels frauduleux (rapport « From the Hives » issu de la Commission européenne), détraquent le marché mondial et européen en tirant les prix vers le bas. Or la France importe 60 % de sa consommation de miel (UE et hors UE). Elle est donc très impactée par les niveaux de prix de ces marchés. Niveaux de prix sur lesquels les exploitations françaises ne peuvent s'aligner en espérant se maintenir et se développer. Cette concurrence déloyale fragilise la filière apicole française et menace sa survie. De plus, il est regrettable de voir les possibles dérogations accordées aux États-membres, permettant de limiter l'étiquetage obligatoire du % aux quatre principaux miels d'origine différente dans un mélange, à condition qu'ils représentent plus de 50 % du poids final. L'affichage des % de tous les pays est pourtant un outil essentiel pour faciliter les contrôles, dans le but de limiter les fraudes sur l'origine. Enfin, plus localement, en Occitanie, il apparaît que les règles d'attribution des MAEC (mesures agro-environnementales et climatiques) entre les ex-régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon n'ont pas été harmonisées et entraînent une forte disparité de traitement pour les exploitations apicoles. L'attribution de ces aides se fait en partie par l'État. Une harmonisation est nécessaire. Aussi, il aimerait savoir quelles sont les dispositions que compte prendre le Gouvernement pour remédier à ces situations.
Réponse publiée le 26 novembre 2024
Conscient du rôle de la filière apicole, tant au niveau de la production de miel et autres produits de la ruche qu'en raison de l'importance majeure de la pollinisation dans le cycle et les rendements des productions végétales, le Gouvernement est attentif à cette filière qui se trouve confrontée à plusieurs défis majeurs. L'impact du frelon asiatique étant important sur les abeilles domestiques, le ministère chargé de l'agriculture travaille étroitement avec le ministère chargé de l'écologie et la filière apicole. Le fonds vert a pu ainsi être mobilisé pour des projets globaux de lutte contre le frelon et le Gouvernement continuera à apporter des financements pour la lutte contre les espèces exotiques envahissantes (EEE) dans le cadre de la stratégie nationale biodiversité (SNB 2030). En outre, le sénat s'est emparé du sujet et une proposition de loi a été adoptée à l'unanimité en première lecture le 11 avril 2024, avec le soutien du Gouvernement. Elle prévoit, à titre principal, la préparation d'un plan national et ses déclinaisons locales ainsi que la création d'un régime d'indemnisation pour les apiculteurs professionnels. Cette proposition de loi est à mettre en lien avec l'élaboration d'un plan d'actions national publié en février 2024 par les organismes à vocation sanitaire (FREDON France et GDS France), qui prévoit trois volets d'action ajustés en fonction du niveau de présence de l'insecte et de la pression de prédation : le piégeage de printemps des fondatrices, la destruction des nids et la protection des ruches. Parallèlement, le programme d'aides à destination de la filière apicole de la politique agricole commune (PAC) accompagne financièrement l'institut technique et scientifique de l'apiculture et de la pollinisation (ITSAP-Institut de l'abeille) et le muséum national d'histoire naturelle depuis 2013 pour leurs actions techniques et scientifiques relatives à l'identification et à la validation des outils de lutte contre le frelon asiatique. Par ailleurs, le Gouvernement poursuit son accompagnement de la filière au moyen d'un plan d'actions publié le 23 février 2024, structuré autour de quatre axes. Le premier axe consiste à améliorer la réglementation relative à l'étiquetage de l'origine des miels et renforcer les contrôles sur l'authenticité et la qualité des produits, afin de lutter contre les fraudes et améliorer la transparence de l'information fournie au consommateur. Parmi les actions envisagées figure l'adoption d'un décret transposant la directive n° 2024/1438 du 14 mai 2024 modifiant la directive 2001/110/CE dite « miel » et révisant la règlementation sur l'étiquetage de l'origine des miels. Les dispositions nationales seront mises en œuvre après consultation de la filière apicole et conduiront en tout état de cause à améliorer les règles actuelles qui prévoient l'indication des pays d'origine où le miel a été récolté par ordre pondéral décroissant pour les miels conditionnés en France. Enfin, la mesure agro-environnementale et climatique « amélioration du potentiel pollinisateur des abeilles domestiques pour la préservation de la biodiversité » (MAEC API) vise à promouvoir des pratiques apicoles durables et favorables à l'environnement. Le conseil régional d'Occitanie a choisi de mobiliser les reliquats du fonds européen agricole pour le développement rural de la programmation de la PAC 2014-2022 dans le cadre de son programme de développement rural pour financer la MAEC API pour les campagnes 2023 et 2024. Il relève donc de sa responsabilité de fixer les critères de priorisation de cette aide, dans le respect du cadre réglementaire fixé au niveau national.
Auteur : M. Joël Aviragnet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 26 novembre 2024