Question écrite n° 9801 :
Accès à l'hygiène des personnes exilées présentes sur le littoral Nord

17e Législature

Question de : Mme Élisa Martin
Isère (3e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

Mme Élisa Martin attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les situations de non-accès aux services de base en hygiène des personnes exilées présentes sur le littoral Nord. L'accès à l'hygiène relève du droit à la santé et de la dignité. Pourtant, la majorité des personnes exilées à Calais et Dunkerque ne peuvent pas se laver régulièrement. Mme la députée rappelle que selon l'article L. 1321-1 du code de la santé publique, « toute personne bénéficie d'un accès au moins quotidien à son domicile, dans son lieu de vie ou, à défaut, à proximité de ces derniers, à une quantité d'eau destinée à la consommation humaine suffisante pour répondre à ses besoins en boisson, en préparation et cuisson des aliments, en hygiène corporelle, en hygiène générale ainsi que pour assurer la propreté de son domicile ou de son lieu de vie ». À Calais, contrainte par les juges, la préfecture a mis en place quelques cabines de douches, un service géré par La Vie active, une association mandatée par l'État. Ce système de douches est accessible par navettes et ouvert seulement certains jours. On compte 4 points de ramassage à destination des hommes (pour une dizaine de lieux de vie à Calais), 60 % d'entre eux ne se trouvent donc pas à proximité d'un point de ramassage, ce qui montre que les barrières d'accès à l'hygiène sont conséquentes. Un créneau est également mis à disposition pour les femmes. Ce service est disponible uniquement en semaine (du lundi au vendredi) à un horaire unique, ce qui entraîne une discontinuité de l'accès à l'hygiène corporelle. Plusieurs témoignages attestent que le harcèlement de la part de la police à proximité des distributions pousse nombre de personnes à ne pas s'en servir au détriment de leur hygiène et santé. À Dunkerque, trois associations, Roots, Refugee women center et la Croix-Rouge permettent à un nombre limité de personnes de se doucher. Ces associations notent que leurs services sont insuffisants au vu du nombre d'habitants. Par exemple, à chaque session de douches de Roots, au moins une cinquantaine de femmes ne peuvent pas se doucher en raison du nombre trop important de personnes comparé au nombre de douches. Les conséquences sont graves : infections, gale, poux, maladies de peau, ainsi que l'atteinte à la dignité des personnes. Les solutions sont connues : déployer des unités mobiles de douches, accessibles plusieurs fois par semaine et au plus près des lieux de vie. Ces conséquences sont par ailleurs d'autant plus dramatiques sur les enfants. En effet, l'association Project play rapporte qu'elle observe régulièrement des enfants au visage et dents sales, ainsi qu'aux cheveux gras. De nombreux enfants rencontrés expriment leur peur de se salir en jouant, car ils n'ont pas la possibilité de se laver les mains ni leurs vêtements. Ils acceptent de participer, dès lors que des bénévoles de l'association leur proposent de porter des tabliers. Mme la députée rappelle également qu'il n'existe aucun dispositif étatique d'accès à l'hygiène du linge sur le littoral Nord. Le 18 mars 2024, une laverie solidaire mise en place par l'association Collective aid a fait l'objet d'une fermeture administrative par l'État le 18 mars 2024, sans alternative proposée. La seule solution actuelle de laverie à Calais est le système rudimentaire mis en place à l'accueil de jour du Secours catholique, dont les moyens sont très limités : environ 10 h de disponibilité par semaine. Les conséquences du manque de laveries sont évidentes sur l'hygiène personnelle des exilés et donc sur la santé publique. Les organisations de Calais ont déjà émis, depuis des années, des propositions de laveries solidaires sur des modèles de laveries existantes pour les personnes sans papiers. Entre avril 2023 et février 2025, il y a eu ainsi au moins 7 interpellations, par les organisations de Calais, à destination de la préfecture du Nord, de la sous-préfecture, de la DDETS, du ministère de la santé, de la transition écologique et de M. le Premier ministre, qui n'ont débouché sur aucune réponse satisfaisante. L'accès aux toilettes est aussi un droit fondamental, lié à la santé et à la dignité. Le standard humanitaire prévoit au minimum un bloc pour 20 personnes. Or, dans l'immense majorité des lieux de vie, il n'y a aucune installation (deux lieux de vie à Calais sont équipés au total, dont l'un avec un bloc pour 100 personnes, tandis qu'à Dunkerque l'accès à des toilettes est simplement inexistant). En conséquence, la défécation à l'air libre est la pratique la plus répandue, avec des risques sanitaires majeurs : maladies hydriques, propagation de parasites. De surcroît, les femmes sont exposées à des violences lorsqu'elles doivent s'isoler. Mme la députée rappelle à M. le ministre qu'une action inter-associative a mené à une décision du Conseil d'État en juillet 2017, qui a confirmé la compétence préfectorale sur la mise à disposition d'équipements d'accès à l'eau, l'hygiène et l'assainissement. Elle souhaiterait donc savoir quelles sont les mesures qu'il entend mettre en place afin qu'un droit aussi fondamental que celui de l'accès à l'hygiène soit garanti aux personnes exilées.

Données clés

Auteur : Mme Élisa Martin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date :
Question publiée le 23 septembre 2025

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