Question écrite n° 981 :
Vote en faveur de la résolution de l'Autriche sur l'interdiction des SALA

17e Législature

Question de : M. Aurélien Saintoul
Hauts-de-Seine (11e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. Aurélien Saintoul interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la résolution intitulée « Systèmes d'armes létaux autonomes » qui sera formellement déposée par l'Autriche en Première commission des Nations unies d'ici le 17 octobre 2024. En raison de la difficulté à limiter et prévoir leurs effets, le recours aux systèmes d'armes autonomes présente un risque moral, ainsi qu'un risque de violation du droit humanitaire international, un système automatisé ne pouvant faire la distinction entre un combattant et un civil. L'ONU appelle à un dialogue constructif et à une coopération internationale renforcée pour relever ces défis notamment par l'ouverture d'une consultation informelle et publique qui devra aboutir à la présentation d'un rapport courant 2025. Cette consultation constitue un préalable à l'ouverture de toute négociation sur un traité international d'interdiction de ces armes. Alors que les organisations non gouvernementales, les comités scientifiques et une grande partie des États alertent sur les dangers humanitaires engendrés par le déploiement de ces armes, la position de la France dans l'élaboration d'un traité international reste encore incertaine. Pourtant, il est impératif pour le Gouvernement d'appuyer les tentatives d'António Guterres, secrétaire général des Nations unies, d'ouvrir des négociations sur ce sujet à New York, malgré l'opposition de pays comme la Russie. En effet, celle-ci s'oppose à tout accord international contraignant et affirme que le droit international existant suffit, entravant ainsi le processus de négociation. Considérant les risques humanitaires et éthiques que présentent ces armes, il est primordial que la France vote en faveur de la résolution présentée par l'Autriche lors du vote en Première commission qui se tiendra début novembre. M. le député souhaiterait connaître la position de la France sur cette question. Par ailleurs, il souhaite savoir si celle-ci envisage de coparrainer la résolution afin de lui donner le plus de poids possible.

Réponse publiée le 10 décembre 2024

La France a voté en faveur de la résolution portée en 2024 par l'Autriche et d'autres États sur les systèmes d'armes létaux autonomes (SALA), après s'être activement impliquée dans sa négociation, permettant l'atteinte d un compromis qui a favorisé son adoption la plus large possible. En lien avec ses partenaires, la France a tenu à rappeler sa vigilance à ce que les consultations initiées par cette résolution aident à remplir le mandat du Groupe d'experts gouvernementaux (GGE) sur les technologies émergentes dans le domaine des systèmes d'armes létaux autonomes mis en place dans le cadre de la Convention sur certaines armes classiques (CCAC) à Genève, et ne dupliquent pas ni ne fragilisent ces travaux. Ainsi, une complémentarité avec le GGE SALA devra être observée. Pour être efficace, les consultations doivent réunir les acteurs du GGE SALA, notamment les États en capacité de développer les technologies en question. Elles ne doivent conduire à un détournement des ressources et de l'expertise des délégations du GGE SALA. Elles ne peuvent créer un processus parallèle dont les discussions se feront au détriment du GGE SALA, dans un contexte où la Russie ne devrait pas participer de manière constructive aux discussions au sein de la Première Commission des Nations unies, et tirera par ailleurs prétexte du lancement de ces discussions pour paralyser plus encore les discussions au sein du GGE.  Pour mémoire, la France a pleinement pris la mesure des enjeux stratégiques, juridiques et éthiques soulevés par le développement de l'intelligence artificielle (IA), et en particulier par l'émergence potentielle de systèmes d'armes létaux autonomes (SALA). Au niveau national, la France a adopté une stratégie qui vise à développer l'IA de défense d'une manière ambitieuse et responsable, dans le respect de trois principes cardinaux : le respect du droit international, la responsabilité du commandement humain et le maintien d'un contrôle humain approprié sur les systèmes d'armes. Au niveau international, c'est à l'initiative de la France que la question des SALA a été introduite aux Nations unies, dans l'enceinte de la CCAC à Genève. La France a également soutenu l'adoption par l'Assemblée générale des Nations unies de la résolution 78/241 du 22 décembre 2023 qui souligne l'urgence de répondre aux enjeux que soulèvent les systèmes d'armes autonomes, en particulier dans le cadre du Groupe d'experts gouvernementaux (GGE) sur les technologies émergentes dans le domaine des SALA. Conformément à cette résolution et dans la continuité de son engagement résolu sur le sujet, la France a transmis ses vues au Secrétaire général des Nations unies sur les moyens d'agir pour faire face à ces enjeux. Dans ce rapport, le Secrétaire général enjoint les Hautes parties contractantes à la CCAC d'oeuvrer avec diligence pour que le GGE s'acquitte de son mandat dès que possible. Le travail effectué par le GGE SALA a permis de progresser collectivement tant dans la compréhension des défis posés par de potentiels SALA que dans l'identification des voies pour répondre à ces défis. Le mandat du GGE a été renouvelé et renforcé à l'occasion de la dernière réunion des Hautes parties contractantes de la CCAC en novembre 2023. Il est désormais chargé d'examiner et de formuler des éléments d'un potentiel instrument relatif aux SALA. La France considère que la meilleure chance d'aboutir à un encadrement international efficace, qui inscrive le développement et l'emploi des SALA dans le respect du droit international humanitaire, est de poursuivre jusqu'à son terme le processus engagé au sein de la CCAC, malgré les difficultés par certains pays ouvertement obstructionnistes, à commencer par la Russie. La CCAC demeure en effet l'enceinte la plus appropriée pour répondre aux enjeux soulevés par ces systèmes d'armes. Surtout, elle est la seule enceinte dans le cadre de laquelle il est possible de proposer des mesures universellement acceptées et donc mises en oeuvre par les États susceptibles de développer de tels systèmes. La France fait partie des pays qui promeuvent une approche ambitieuse de ce que pourrait être l'instrument international relatif aux SALA, puisqu'elle soutient en effet la négociation d'un protocole additionnel à la CCAC, instrument juridiquement contraignant. Elle propose que cet instrument adopte une « double approche » dans le cadre de laquelle les Hautes parties contractantes s'engageraient à renoncer aux SALA opérant en dehors de toute forme de contrôle humain (« pleinement autonomes  ») et à mettre en oeuvre les mesures nécessaires afin de garantir que les systèmes d'armes létaux dotés d'autonomie dans leurs fonctions critiques (« partiellement autonomes ») soient développés et utilisés en conformité avec le droit international humanitaire. La France a d'ores et déjà transmis, en collaboration avec l'Allemagne, la Bulgarie, le Danemark, l'Italie, le Luxembourg et la Norvège, des propositions en ce sens.

Données clés

Auteur : M. Aurélien Saintoul

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 15 octobre 2024
Réponse publiée le 10 décembre 2024

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