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Mardi 26 mars, la commission des affaires économiques a examiné, puis adopté, une proposition de loi visant à garantir un revenu digne aux agriculteurs et accompagner la transition agricole. Ce texte sera débattu en séance publique jeudi 4 avril, dans le cadre de la journée réservée au groupe Écologiste-NUPES. La députée Marie Pochon (Ecolo-NUPES, Drôme) en est la rapporteure.
La rapporteure déplore que « beaucoup trop d’agriculteurs ne peuvent vivre de leur travail ». Citant les comptes nationaux prévisionnels de l’agriculture pour 2023 publiés par l’Insee, la rapporteure explique que le revenu des agriculteurs a diminué de 9 % en 2023, alors que les profits bruts de l’industrie agro-alimentaire ont plus que doublé, passant de 3,1 Mds d’euros à 7 Mds d’euros. La marge brute de la grande distribution a, quant à elle, augmenté en moyenne de 57 % sur les pâtes alimentaires, 13 % sur les légumes et 28 % sur le lait demi-écrémé. Elle évoque, par ailleurs, une étude de la Fondation pour la nature et l’homme sur l’évolution du montant de la marge brute réalisée par chaque acteur sur 1 litre de lait demi-écrémé, entre 2001 et 2022, qui montre à quel point la valeur ajoutée a été captée par les entreprises de la distribution et de l’agroalimentaire au détriment des éleveurs, puisque, sur la période, les distributeurs ont vu leur marge augmenter de 188 % et les entreprises agroalimentaires de 64 %, tandis que les éleveurs ont réduit la leur de 4 %.
Elle souligne qu’« on ne peut pas poser les enjeux de l’installation, de la transmission ou de la transition écologique sans avoir posé celui du revenu de façon centrale et prépondérante ».
La proposition de loi vise à la fixation de prix minimaux d’achat, qui deviennent de véritables « filets de sécurité » pour les agriculteurs.
L’article 1er vise à améliorer le fonctionnement des conférences publiques de filière. Il a également pour objet de confier à ces conférences le soin de proposer, chaque année, une estimation des coûts de production au sein de chaque filière, ces derniers devant inclure une rémunération des agriculteurs comprise entre 1,5 et 2 Smic, cette estimation servant ensuite de base à la définition d’un seuil minimal d’achat des produits agricoles.
Les conférences publiques de filières ont été créées par l’article 104 de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Constituées pour chaque filière, elles doivent se réunir chaque année afin d’examiner « la situation et les perspectives d’évolution des marchés agricoles et agroalimentaires » et de proposer une estimation des coûts de production en agriculture et de leur évolution pour l’année à venir, en tenant compte de la diversité des bassins et des systèmes de production. Le décret d’application de ces dispositions n’ayant jamais été publié, la rapporteure a regretté que ces conférences ne se soient, en pratique, jamais réunies.
Dès lors, l’article propose de réunir les conférences publiques de filière sous l’égide du médiateur des relations commerciales agricoles, en lieu et place de FranceAgriMer, et d’en modifier la composition en l’élargissant aux représentants de la restauration hors domicile et aux associations de consommateurs. L’article dispose, par ailleurs, qu’à l’issue de la réunion de la conférence et si celle-ci parvient à un consensus sur le niveau minimal du prix d’achat, celui-ci fasse référence. Enfin, l’article intègre la rémunération des agriculteurs dans le calcul de l’estimation des coûts de production, à hauteur de 1,5 à 2 Smic.
En commission, les députés ont prévu que les conférences devront proposer une estimation des coûts de production tous les quatre mois (CE35) et qu’elles devront se réunir en cas de forte variation présumée des coûts de production agricole (CE37). Ils ont également décidé que les estimations devront tenir compte d’une rémunération des agriculteurs à hauteur de 2 Smic (CE41) ainsi que de la taille des exploitations (CE36). Ils ont par ailleurs prévu que, pour déterminer le seuil minimal d’achat des produits agricoles, les parties devront s’appuyer sur les modalités de fixation du prix des systèmes de garanties et des labels de commerce équitable (CE8).
A l’initiative du président de la commission des affaires économiques, Stéphane Travert, les députés ont adopté un article additionnel demandant au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement présentant les moyens législatifs et réglementaires permettant de mieux prendre en considération les coûts de production dans la formation des prix d’achat aux agriculteurs (CE40).
L’article 2 crée un fonds consacré à la transition agroécologique des exploitations agricoles. Les députés ont élargi, en commission, le périmètre du fonds au soutien aux exploitations biologiques (CE38).
L’article 3 crée une contribution additionnelle de 10 % sur les bénéfices générés par les industries de l’agroalimentaire, des produits phytosanitaires et des engrais de synthèse parmi les sociétés redevables de l’impôt sur les sociétés qui réalisent un chiffre d’affaires annuel supérieur à 50 millions d’euros, en vue de financer le fonds créé à l’article 2. En commission, les députés ont élargi le périmètre de cette contribution aux entreprises de la grande distribution (CE52).