Revalorisation du RSA et baisse des conseils départementaux
Question de :
Mme Élise Leboucher
Sarthe (4e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Élise Leboucher appelle l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur l'insuffisance du soutien financier apporté par l'État aux conseils départementaux pour leur permettre de financer la revalorisation annuelle du revenu de solidarité active (RSA). L'État confie aux départements la responsabilité d'être les garants des solidarités de proximité. Cette solidarité recouvre de nombreux dispositifs : revenu de solidarité active (RSA), allocation personnalisée d'autonomie (APA), Prestation de compensation du handicap (PCH) ou autres dispositifs d'insertion. Pourtant, l'écart se creuse chaque année un peu plus entre cette responsabilité grandissante et les moyens alloués pour les exercer. Cette contradiction s'est de nouveau révélée à l'occasion de la revalorisation du RSA de 1,7 %, il y a quelques semaines. Automatique mais bien décidée par l'État, cette décision nationale imposée localement implique, pour les exécutifs locaux de prendre en charge des décisions qu'ils n'ont ni votées et surtout, ni budgétées. Le cas du département de la Sarthe qui a alerté comme beaucoup d'autres sur son incapacité à financer cette revalorisation, reflète une réalité plus large : celle d'une double tenaille budgétaire. D'un côté, une progression continue des dépenses, auxquelles s'ajoute la solidarité nationale ; de l'autre, des recettes et un budget qui diminuent. En Sarthe, la revalorisation du RSA pour 11 500 foyers entraîne une dépense supplémentaire de 1,2 millions d'euros pour le département, quand son budget prévisionnel prévoit 10 millions d'euros de recettes en moins provenant de l'État. L'augmentation de ces dépenses est multifactorielle : charges nouvelles, protection de l'enfance, hausse du nombre de personnes âgées dépendantes, etc. Cette pression est aggravée par la dernière loi de finances, passée en force à l'Assemblée nationale. Celui-ci ampute encore davantage les marges de manœuvre financières des collectivités locales. Ainsi, on demande aux départements de faire plus avec moins de moyens. Cette logique n'est pas tenable. Elle met à mal, à terme, la décentralisation, en affaiblissant le principe de libre administration des collectivités territoriales. En faisant porter le poids de nouvelles responsabilités sans en assumer le coût, l'État compromet la continuité des politiques sociales de proximité, tous les départements n'ayant pas la même santé financière. Aussi, elle lui demande solennellement de prendre en compte cette situation et d'enfin reconnaître le rôle essentiel des départements et de leur volet social, en leur garantissant les moyens d'exercer pleinement leurs missions. Il en va de la capacité des territoires à faire vivre les principes républicains. La priorité doit être donnée à la compensation de l'augmentation des allocations individuelles de solidarité, le RSA en premier lieu.
Réponse publiée le 1er juillet 2025
En application de l'article L. 262-3 du code de l'action sociale et des familles, le montant forfaitaire du revenu de solidarité active (RSA) fait l'objet d'une revalorisation annuelle, au 1er avril, déterminée en fonction de l'indice des prix à la consommation, hors tabac, mesuré sur douze mois par l'Institut national de la statistique et des études économiques. Pour l'année 2025, le décret n° 2025-293 du 29 mars 2025 est ainsi venu fixer le niveau de cette indexation prévue par la loi à 1,7 %. Bien que générant des dépenses supplémentaires pour les départements, cette revalorisation du montant forfaitaire du RSA n'ouvre pas droit à une compensation financière selon une jurisprudence administrative constante. Malgré cela, le taux de couverture de la dépense de RSA exposée par les départements demeure élevé. Assis sur différents dispositifs – des fractions de l'accise sur les énergies, le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI), le dispositif de compensation péréquée (DCP), le relèvement du taux plafond d'imposition sur les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 3,8 % à 4,5 % ainsi que la troisième part du fonds national de péréquation des DMTO – le taux de couverture du RSA a atteint près de 90 % des dépenses exposées par les départements en 2022 et près de 82 % en 2023. Malgré la diminution des ressources issues des DMTO, ce taux de couverture devrait rester proche de 80 % en 2024. En ce qui concerne plus spécifiquement le département de l'Aisne, le taux de couverture réel de la dépense de RSA s'établit à 78,5 % en 2022, puis à 75 % en 2023, avec 110,4 millions d'euros de charge de RSA pour, en tout, 82,9 millions d'euros de ressources de compensation. Toutefois, compte tenu de la très grande hétérogénéité des situations départementales et d'un « effet ciseau » de nouveau constaté entre la diminution de certaines ressources, notamment des DMTO, et la hausse de leurs dépenses sociales, plusieurs dispositions ont été intégrées à la loi de finances (LFI) pour 2025 visant à soutenir l'échelon départemental. En premier lieu, afin de concilier l'objectif de redressement des finances publiques avec la dégradation de la situation financière des départements, le dispositif de lissage conjoncturel, dit DILICO, défini à l'article 186 de la LFI pour 2025, a modulé la contribution des départements à 220 millions d'euros, la moitié d'entre eux étant exonérés de cette contribution. En second lieu, par l'article 116 de la LFI pour 2025, le Gouvernement est venu donner aux départements, pour une durée de trois ans, la faculté de relever le taux maximal d'imposition de droit commun sur les DMTO qu'ils perçoivent de 4,5 % à 5 % pour les mutations d'immeubles, hors celles concernant les primo-accédants. Enfin, la réforme des concours financiers versés par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) initiée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 doit mécaniquement permettre, les taux de couverture de la dépense d'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH) constatés en 2024 devant a minima de nouveau être atteints en 2025, d'allouer près de 200 millions d'euros supplémentaires aux départements. Pour autant et malgré ces gestes forts, le Gouvernement a conscience de la fragilité actuelle de cet échelon dont certaines ressources peuvent évoluer selon une dynamique inverse à la progression régulière de leurs dépenses sociales d'une part, et, d'autre part, des efforts budgétaires mis en oeuvre par certains départements, comme l'Aisne et le Maine-et-Loire, pour équilibrer les budgets départementaux et financer leurs compétences obligatoires. A partir de ce constat largement partagé, le Gouvernement s'est attaché à dresser un état des lieux précis de leurs finances, préalable à toute évolution de leur modèle de financement. C'est avec ces deux objectifs que se sont d'ores et déjà tenus un premier comité d'alerte sur les finances publiques, le 15 avril 2025, mais aussi, le 6 mai 2025, la réunion d'installation par le Premier ministre de la Conférence financière des territoires dont l'un des quatre groupes de travail thématiques est spécifiquement dédié aux finances départementales. Sur la base d'un diagnostic partagé, ce dernier formulera des propositions financières pérennes pour les départements et soutenables pour l'Etat qui pourront être présentées au Parlement dès la loi de finances pour 2026.
Auteur : Mme Élise Leboucher
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : Travail, santé, solidarités et familles
Ministère répondant : Aménagement du territoire et décentralisation
Dates :
Question publiée le 20 mai 2025
Réponse publiée le 1er juillet 2025