Question de : M. Michel Guiniot
Oise (6e circonscription) - Rassemblement National

M. Michel Guiniot interroge M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice, sur la publication, le 19 septembre 2025, du rapport 2025 sur la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Dans le texte du rapport, il est écrit qu'en 2023, le « taux de prononcé de l'emprisonnement ferme après condamnation pour financement du terrorisme » s'élève à 57,9 % et que 42,1 % de ce taux est prononcé avec sursis. En 2024, le « taux de prononcé de l'emprisonnement avec sursis » est largement supérieur au taux de prononcé de l'emprisonnement ferme, atteignant 83 % pour 13,2 %. Il lui demande donc si une directive particulière a été donnée pour réduire considérablement le taux d'emprisonnement ferme dans les affaires liées au terrorisme.

Réponse publiée le 23 décembre 2025

Il ressort des données mises en lumière par le service statistique du ministère de la Justice, dans le cadre de sa contribution au rapport annuel 2025 du Conseil d'orientation de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (COLB), qu'entre 2022 et 2024, 99 personnes ont été jugées pour des faits délictuels de financement du terrorisme (dont 59 personnes au cours de la seule année 2024). La quasi-totalité de ces personnes ont été condamnées. Au cours des années 2022 et 2023, l'intégralité des condamnations a consisté en des peines d'emprisonnement, fermes (69,2 % des condamnations en 2022 et 57,9 % en 2023), ou assorties d'un sursis (30,8 % des condamnations en 2022 et 42,1 % en 2023). En 2024, une peine d'emprisonnement a été infligée à 96,2 % des personnes condamnées pour financement du terrorisme. Par ailleurs, la même année, 13,2 % des personnes condamnées ont écopé d'une peine d'emprisonnement ferme et 83 % d'entre elles d'une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis. Le Parquet national antiterroriste a pu faire, dans son rapport d'activité, qu'un travail important d'apurement des procédures de financement du terrorisme en attente de traitement avait été conduit au cours de l'année 2024. Ainsi, au cours de l'année 2024, le jugement de procédures (de financement du terrorisme) plus nombreuses mais également plus anciennes et/ou d'une gravité moindre pourrait expliquer la hausse du taux peines d'emprisonnement avec sursis prononcées cette année-là. Il convient toutefois de rappeler qu'en matière de financement du terrorisme, comme s'agissant des autres contentieux, les décisions de relaxe ou de condamnation, et par suite, le choix des peines, sont prises par des magistrats indépendants. En vertu de ce principe, garanti par l'article 64 de la Constitution, il ne revient pas au ministre de la Justice de leur donner quelque directive que ce soit dans le cadre du traitement de ces affaires. Cela étant, le ministère de la Justice demeure pleinement mobilisé, aux côtés de ses nombreux partenaires, afin de lutter efficacement contre le financement du terrorisme et d'en tarir les sources. Ainsi, sur le plan international, il participe activement aux travaux du Groupe d'action financière (GAFI) dont le rôle principal est d'édicter des standards relatifs à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, et d'assurer leur application. La France a d'ailleurs été évaluée par ses pairs entre 2019 et 2022 sur l'efficacité de son dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Le rapport d'évaluation mutuelle de la France, publié par le GAFI en mai 2022, fait état d'un dispositif très solide et sophistiqué. Les points forts de la France reposent notamment sur l'efficacité des enquêtes qui y sont menées. Au niveau national, la coordination interministérielle en matière de financement du terrorisme est assurée par le COLB au sein duquel s'investit pleinement le ministère de la Justice. En outre, le Parquet national antiterroriste (PNAT), qui dispose d'un référent dédié aux affaires de financement du terrorisme, centralise la direction des enquêtes et les poursuites menées en la matière, conformément aux directives de politique pénales rappelées par la circulaire du 17 février 2020 qui demeurent pleinement d'actualité [1]. Ces procédures font ainsi l'objet d'une attention particulière, leur centralisation par le PNAT étant destinée à garantir leur prise en compte par des magistrats spécialisés ; la circulaire du 17 février 2020 rappelle, par ailleurs, qu'elles ont vocation à faire l'objet de poursuites devant le tribunal correctionnel. En outre, le PNAT s'appuie, dans le cadre du suivi de ces procédures, sur des services d'enquête spécialisés et ses liens privilégiés avec TRACFIN. [1] Articles 706-16 et 421-2-2 du code pénal. La circulaire de politique pénale en matière de lutte contre le terrorisme du 17 février 2020 mentionne notamment « Les activités de financement du terrorisme ont, quant à elles, vocation à être systématiquement poursuivies par le parquet national antiterroriste, sous les qualifications autonomes distinctes de celle d'association de malfaiteurs terroriste. Le blanchiment du produit d'infractions terroristes doit également faire l'objet de poursuites systématiques. Sauf circonstances particulières, les individus mis en cause de ces chefs ont vocation à être déférés devant la juridiction correctionnelle. ».

Données clés

Auteur : M. Michel Guiniot

Type de question : Question écrite

Rubrique : Terrorisme

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 30 septembre 2025
Réponse publiée le 23 décembre 2025

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