Question écrite n° 1391 :
Problématiques assurantielles des communes

17e Législature

Question de : Mme Sophie Blanc
Pyrénées-Orientales (1re circonscription) - Rassemblement National

Mme Sophie Blanc attire l'attention de Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation sur la situation critique des communes françaises en matière d'assurances. Depuis plusieurs années, les collectivités locales et en particulier les petites et moyennes communes, rencontrent d'immenses difficultés pour assurer leurs biens et leurs infrastructures. L'augmentation rapide et inexorable des primes d'assurance ainsi que des franchises, conjuguée à une baisse continue des dotations de l'État, expose ces collectivités à des situations financières intenables. Certaines d'entre elles ne parviennent plus à s'assurer correctement, ce qui met en péril l'exercice même de leurs missions de service public. En effet, ces dernières années, les relations entre les collectivités locales et les assureurs se sont nettement dégradées. Alors qu'autrefois le marché de l'assurance offrait une certaine stabilité aux communes, on observe aujourd'hui des hausses vertigineuses des primes, parfois multipliées par deux ou trois, ainsi que des franchises toujours plus élevées. À cela s'ajoutent des cas de résiliations brutales de contrats, qui laissent les communes dans une situation de vulnérabilité accrue. À titre d'exemple, la commune de Lavaur, dans le Tarn, a vu sa prime d'assurance augmenter de 45 % en 2023, sans explication rationnelle de la part de l'assureur. Cette situation est d'autant plus difficile à gérer pour des communes déjà soumises à une réduction de leurs ressources. De même, à La Motte, une petite commune dans les Alpes-de-Haute-Provence, le maire a signalé une augmentation de 60 % de la prime d'assurance pour la protection des écoles et des bâtiments publics. Ce phénomène se répète dans toute la France et concerne particulièrement les petites collectivités, celles qui ont le moins de moyens financiers pour absorber ces hausses. En parallèle, les franchises augmentent aussi considérablement. Certaines communes, comme Saint-André-de-Valborgne dans le Gard, doivent aujourd'hui assumer des franchises supérieures à 10 000 euros, même pour des incidents mineurs. Cette augmentation des franchises implique que les collectivités doivent désormais puiser dans leurs fonds propres pour couvrir des dégâts de faible ampleur, ce qui alourdit encore plus leur charge financière. Cette hausse des coûts intervient dans un contexte de baisse continue des dotations publiques. En effet, les communes françaises ont vu leur dotation globale de fonctionnement (DGF) diminuer de manière significative ces dernières années. Entre 2014 et 2017, la DGF a chuté de 10 milliards d'euros, une tendance qui, bien qu'enrayée, a laissé des séquelles profondes sur les finances locales. Pour les petites et moyennes communes, cette baisse a signifié des coupes drastiques dans les budgets déjà limités. Par exemple, à Mazan, une commune du Vaucluse, le maire a dû réduire le financement des activités périscolaires et repousser des projets d'aménagements publics en raison de la baisse des dotations et de la hausse des coûts assurantiels. D'autres communes, comme celles situées dans les zones rurales de la Creuse, n'ont pas les ressources financières pour maintenir un niveau de services publics adéquat, ce qui expose leurs infrastructures à des risques accrus sans pouvoir bénéficier d'une couverture assurantielle suffisante. Outre la hausse des primes, un autre problème majeur auquel sont confrontées les communes est la résiliation brutale de leurs contrats d'assurance. Plusieurs communes ont vu leurs contrats résiliés unilatéralement par les assureurs, sans possibilité de négociation, souvent à cause des sinistres fréquents ou de la situation géographique de la collectivité. Par exemple, la commune de Saint-Priest-en-Jarez, dans la Loire, a vu son contrat résilié après plusieurs petits sinistres dans les bâtiments scolaires. Le maire de cette commune a alors été contraint de rechercher un nouvel assureur dans l'urgence et ce, à des conditions beaucoup moins favorables. Ce phénomène est d'autant plus inquiétant que le marché de l'assurance des collectivités est aujourd'hui en situation de quasi-monopole. Comme le souligne le rapport de l'AMF, le secteur est dominé par un très petit nombre d'acteurs, ce qui limite la concurrence et empêche les communes de négocier les conditions de leurs contrats. Certaines communes se retrouvent ainsi sans offre concurrentielle viable et doivent se plier aux conditions imposées par les rares assureurs présents sur ce marché. Face à cette situation, il est urgent que l'État prenne des mesures pour garantir aux communes, notamment les plus petites, une capacité à s'assurer dans des conditions décentes. Sans intervention rapide, la situation pourrait empirer et certaines communes pourraient se retrouver dans l'incapacité de remplir leurs missions de service public, faute de couverture assurantielle. Plusieurs pistes de solutions ont déjà été avancées dans le rapport Chrétien-Dagès. Outre la création d'un fonds d'indemnisation pour les émeutes, il est proposé de mettre en place un observatoire national de l'assurance des collectivités, qui serait chargé de suivre l'évolution des primes et des franchises et de garantir une transparence accrue sur ce marché. Cet observatoire, qui pourrait être piloté par la Caisse centrale de réassurance (CCR), aurait pour mission d'évaluer l'adéquation entre l'offre assurantielle et les besoins des collectivités, en s'assurant qu'une concurrence saine puisse se développer. Le rapport recommande également une révision du guide de bonnes pratiques pour la passation des marchés publics d'assurance. Ce guide, déjà en cours de mise à jour, permettrait aux communes de mieux négocier leurs contrats et de se prémunir contre les abus des assureurs. Cependant, ces mesures ne répondent pas à l'urgence actuelle et beaucoup de communes se retrouvent sans solution immédiate. Quelles mesures concrètes et rapides Mme la ministre compte-t-elle prendre pour répondre à cette situation ? Il est impensable que, dans la France du XXIe siècle, des communes ne puissent plus s'assurer, mettant ainsi en danger la continuité de leurs services publics et la protection de leurs administrés. Les recommandations du rapport Chrétien-Dagès doivent être mises en œuvre sans plus tarder et des actions fortes doivent être entreprises pour rétablir un équilibre sur le marché de l'assurance des collectivités. La création d'un fonds d'indemnisation des risques liés aux émeutes, la mise en place d'un observatoire national de l'assurance, ainsi que la réforme de la réglementation des marchés publics d'assurance, sont autant de mesures nécessaires pour protéger les communes et garantir la continuité des services publics de proximité. Elle souhaite connaître ses intentions à ce sujet.

Données clés

Auteur : Mme Sophie Blanc

Type de question : Question écrite

Rubrique : Assurances

Ministère interrogé : Partenariat territoires et décentralisation

Ministère répondant : Aménagement du territoire et décentralisation

Date :
Question publiée le 29 octobre 2024

partager