Question écrite n° 2044 :
Risques d'épuisement qui pèsent sur les maires des communes françaises

17e Législature

Question de : Mme Sophie Blanc
Pyrénées-Orientales (1re circonscription) - Rassemblement National

Mme Sophie Blanc applle l'attention de Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation sur les risques d'épuisement qui pèsent sur les maires des communes françaises. Le mandat de maire, véritable clé de voûte de la démocratie locale, est aujourd'hui en péril face à des difficultés grandissantes. L'épuisement physique et moral des élus locaux atteint des proportions inquiétantes, menaçant leur engagement et, à travers eux, l'équilibre des territoires. En 2024, plusieurs études, notamment de l'Observatoire Amarok et de l'Association des maires de France (AMF), ont révélé une détresse profonde chez les maires, qu'ils soient à la tête de grandes métropoles, de communes rurales ou de villes moyennes. Une intervention urgente de l'État est nécessaire pour répondre aux défis qui varient selon la taille et les caractéristiques des collectivités. Plus de 30 % des maires présentent des signes d'épuisement, et près de 3,5 % sont au bord du burnout, selon l'AMF. Ce phénomène est le reflet de charges croissantes, tant administratives que psychologiques, auxquelles ils sont confrontés. Dans les petites communes rurales, la situation est souvent exacerbée par un manque criant de ressources, forçant les maires à assumer eux-mêmes de nombreuses responsabilités. Dans des villages comme Le Ferré en Ille-et-Vilaine, par exemple, le maire gère seul des tâches administratives essentielles en l'absence de personnel suffisant. Dans ce contexte, plusieurs études montrent également l'ampleur de la souffrance des élus femmes, qui se retrouvent davantage exposées au burnout et souffrent d'un manque de soutien et de reconnaissance. Les plus petites communes, où l'élu se retrouve souvent sans équipe, souffrent particulièrement de cette surcharge de travail. Face à cette situation, des initiatives comme le projet AMAROK e-SANTÉ se mettent en place pour offrir des cellules d'écoute aux élus locaux, afin de prévenir les risques psychosociaux. Les exemples marquants de souffrance des maires sont nombreux. Les actes d'incivilité à l'encontre des maires se multiplient. En 2023, plus de 2 000 agressions verbales ou physiques ont été recensées. Par exemple, le maire d'une petite commune du Loiret, Éric Deschamps, a été contraint de démissionner après avoir reçu des menaces de mort. Selon un rapport récent, 83 % des maires se sentent isolés dans l'exercice de leurs fonctions, particulièrement dans les communes rurales. Ils doivent gérer seuls des problématiques variées, et cette solitude les expose à un stress constant. Les maires dénoncent unanimement la complexité des démarches administratives, jugées chronophages et décourageantes. À Saint-Palais-sur-Mer, le maire évoque une « bataille quotidienne » pour obtenir des subventions ou boucler des dossiers. Les différences entre les grandes villes, les villes moyennes et les zones rurales sont marquées. Les élus ruraux sont les premiers à subir les conséquences du désengagement de l'État dans des secteurs cruciaux comme la santé et les transports. Par exemple, l'absence de médecins dans certaines zones rurales pousse de nombreux maires à organiser eux-mêmes des permanences médicales ou à négocier avec des professionnels de santé. Les maires des villes moyennes jonglent avec des ressources limitées tout en faisant face à une montée des exigences des citoyens. Dans des villes comme Alès, la revitalisation des centres-villes et la gestion des tensions sociales (insécurité, logement) mobilisent l'essentiel des efforts de la municipalité. La surcharge de travail, accompagnée d'un sentiment d'impuissance, fragilise la santé mentale des élus. Une étude montre que 65 % des maires dorment moins de six heures par nuit, et que 40 % se déclarent en état de fatigue permanente. Dépression et épuisement professionnel touchent désormais un maire sur trois. Selon l'AMRF, les démissions d'élus locaux augmentent de façon alarmante, ce qui a poussé l'AMF à appeler l'État à agir rapidement pour alléger la charge de ces élus et encourager des dispositifs de soutien psychologique. Ces élus ne demandent pas des privilèges, mais une reconnaissance concrète de leur rôle. Quelles mesures de simplification administrative Mme la ministre envisage-t-elle de mettre en oeuvre pour faciliter la gestion quotidienne des communes ? Quels moyens humains et financiers seront alloués aux petites communes rurales, les plus vulnérables face à cette crise ? Quels dispositifs seront instaurés pour protéger les élus des incivilités et leur offrir un accompagnement psychologique adapté ? Mme la ministre envisage-t-elle un programme national de sensibilisation pour encourager les citoyens à s'investir davantage dans la vie publique locale ? Envisage-t-elle une réforme du statut de l'élu local ? Le maire n'est pas seulement un gestionnaire ou un administrateur. Il est un acteur central de la cohésion sociale et de la démocratie. Sans action concrète, les démissions risquent de se multiplier, mettant en péril l'avenir des territoires. Préserver la santé des maires, c'est préserver l'avenir de la France. Elle souhaite connaître ses intentions à ce sujet.

Réponse publiée le 25 février 2025

Le Gouvernement porte une attention particulière à la situation des élus locaux, en particulier des maires. La question de leur sécurité est une priorité de l'Etat. Aux côtés des élus locaux dont elles sont les premières interlocutrices, les forces de sécurité intérieure, police et gendarmerie nationales, sont pleinement mobilisées pour assurer leur protection et les soutenir dans l'exercice de leurs fonctions. Au niveau national, un centre d'analyse et de lutte contre les atteintes aux élus (CALAÉ) a été créé le 17 mai 2023. Il a vocation à collecter et analyser les menaces et violences faites aux élus, ceci afin d'adapter le dispositif de réponse en temps réel et mieux comprendre le phénomène. Il produira à cet effet un rapport annuel sur le sujet. Il est également chargé du déploiement du plan national de prévention et de lutte contre les atteintes aux élus lancé le 7 juillet 2023 par le Gouvernement. Doté d'un budget de 5 millions d'euros et composé de 12 mesures, ce plan cherche à agir sur 4 axes : mieux accompagner les élus, mieux les protéger, mieux sanctionner les agresseurs et mieux communiquer entre les élus et la justice. Un guichet d'appui et d'accompagnement psychologique a ainsi été mis en place par le Gouvernement, accessible tous les jours au 01 80 52 33 84. D'autres mesures du plan ont déjà trouvé une traduction législative. Ainsi, la compensation forfaitaire versée par l'État pour le financement des contrats d'assurance couvrant la protection fonctionnelle des élus, initialement destinée aux communes de moins de 3 500 habitants, a été étendue aux communes de moins de 10 000 habitants dans le cadre de la loi de finances pour 2024. La loi n° 2024-247 du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux a consolidé l'arsenal répressif en cas de violences commises à l'encontre d'élus locaux et a amélioré leur prise en charge le cas échéant. Enfin, le Premier ministre, lors de la clôture du congrès de l'association des maires de France le 21 novembre 2024, a annoncé l'inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale en février 2025 de l'examen de la proposition de loi sur le statut de l'élu, adoptée en mars 2024 par le Sénat. Le Gouvernement soutient l'adoption de ce texte qui vise à améliorer, par des mesures concrètes, les conditions d'exercice des mandats locaux et assurer une meilleure conciliation de ces mandats avec la vie professionnelle et personnelle des élus.

Données clés

Auteur : Mme Sophie Blanc

Type de question : Question écrite

Rubrique : Communes

Ministère interrogé : Partenariat territoires et décentralisation

Ministère répondant : Aménagement du territoire et décentralisation

Dates :
Question publiée le 19 novembre 2024
Réponse publiée le 25 février 2025

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