Question écrite n° 5637 :
Opacité et incohérences du zonage FRR

17e Législature
Question signalée le 30 juin 2025

Question de : M. Paul-André Colombani
Corse-du-Sud (2e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires

M. Paul-André Colombani attire l'attention de M. le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation sur les incohérences et le manque de transparence du dispositif des zones France ruralités revitalisation (FRR), tel qu'il résulte de l'article 44 quindecies A du code général des impôts, modifié par les articles 77 et 99 de la loi de finances pour 2025 (n° 2025-127 du 14 février 2025). En effet, le II et le III de l'article 44 quindecies A du code général des impôts instaurent de nouveaux critères d'éligibilité des communes rurales au dispositif FRR à compter du 1er juillet 2024. L'application de ces critères a pour conséquence d'exclure du dispositif pérenne 2 168 communes rurales précédemment classées en zones de revitalisation rurale (ZRR). Certes, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit que ces communes bénéficient d'une période transitoire leur permettant de rester temporairement éligibles jusqu'au 31 décembre 2027. Pour autant, aucune solution durable n'est prévue au-delà de cette échéance, alors même que leurs difficultés structurelles, telles que l'enclavement, le déclin démographique et la fragilité économique, apparaissent durables. Par ailleurs, le III de ce même article institue un zonage dit « FRR plus » (FRR+), destiné à soutenir les communes rurales les plus vulnérables selon la grille de densité établie par l'INSEE et un indice synthétique tenant compte des dynamiques liées au revenu, à la population et à l'emploi. Toutefois, l'alinéa concerné impose expressément que les communes éligibles au « FRR+ » soient préalablement classées dans le niveau FRR « socle », tel que défini au II du même article. Ainsi, cette exigence entraîne une situation paradoxale dans laquelle certaines communes, reconnues comme prioritaires au regard de leurs fragilités, sont éligibles au « FRR+ » mais en sont exclues faute de remplir les critères du niveau « socle », les privant ainsi de tout soutien au terme de la période transitoire. S'ajoute à cela une forte incompréhension liée à l'opacité des critères définis aux alinéas A à G du II pour le classement en FRR « socle ». Ces critères complexes et peu lisibles suscitent un profond sentiment d'arbitraire chez les élus locaux. Ce ressenti est d'autant plus vif que, dans certains établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), des communes rurales situées dans un même bassin de vie, confrontées aux mêmes réalités socio-économiques, se retrouvent traitées différemment : certaines sont intégrées au zonage FRR, d'autres non, sans justification apparente. Ainsi, de nombreuses communes rurales, qui n'étaient déjà pas intégrées au dispositif ZRR, demeurent exclues du nouveau dispositif FRR sans pouvoir clairement identifier les raisons objectives de leur éviction. Face à ces incohérences et difficultés d'application concrètes, il lui demande s'il envisage de clarifier ou de modifier les dispositions de l'article 44 quindecies A précité. Il souhaite notamment savoir si les critères de classement feront l'objet d'une publication précise et transparente et si des évolutions sont envisagées, soit pour intégrer systématiquement les communes rurales au sens de l'INSEE au zonage FRR « socle », soit pour supprimer la condition d'éligibilité préalable à ce niveau afin de permettre un accès direct au dispositif « FRR+ ».

Réponse publiée le 15 juillet 2025

Issue d'une concertation avec l'ensemble des acteurs concernés conduite alors par Dominique FAURE, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, la refonte des ZRR constitue le quatrième axe du plan « France ruralités ». Elle a été adoptée dans la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 (article 73) et ajustée par la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 (article 99). Cette réforme poursuit des objectifs d'équité, de simplification et d'efficacité. Un seul zonage, décliné en deux niveaux, FRR « socle » et FRR « plus », est ainsi mis en œuvre afin d'adapter le soutien aux territoires en fonction de leur vulnérabilité, sur la base de données objectives et actualisées de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Il ouvre droit à des dispositifs d'exonérations fiscales et sociales renforcées, en faveur des entreprises, ainsi qu'à diverses mesures adossées (majoration de la dotation globale de fonctionnement – dotation de solidarité rurale ; bonification de la subvention France services etc.) afin de renforcer l'attractivité et de soutenir le développement des territoires zonés. Les critères de classement sont définis de manière précise et transparente à l'article 44 quindecies A du code général des impôts (CGI). Sont classées en zone FRR les communes de France métropolitaine de moins de 30 000 habitants membres un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) remplissant les critères cumulatifs de densité de population (inférieure ou égale à la médiane, soit 63,57 hab/km2) et de revenu disponible médian par unité de consommation (inférieur ou égal à la médiane, soit 21 570 €). Les EPCI à fiscalité propre de montagne (dont au moins 50% de la population est située en zone de montagne au sens de l'article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985) font l'objet d'une attention particulière avec un critère de revenu assoupli (inférieur ou égal au 75ème centile, soit 22 822,5 €). L'article 99 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 a permis, pour matérialiser l'engagement du Premier ministre Gabriel ATTAL, à près de 2 200 communes précédemment situées en ZRR, n'ayant pas été classées FRR par l'arrêté initial du 19 juin 2024 de bénéficier des effets de ce nouveau zonage jusqu'au 31 décembre 2027. Il ajoute également des critères de classement à l'échelle des EPCI à fiscalité propre à la demande des parlementaires. Au total, près de 20 000 communes sont situées en zone FRR « socle », depuis le 1er juillet 2024, dont près de 17 800 communes classées en FRR et 2 200 communes bénéficiant des effets de ce nouveau zonage, soit un total d'environ 20 000 communes et plus de 2 000 communes de plus qu'en ZRR. L'ensemble des communes pouvant bénéficier du zonage FRR a été actualisé avec la publication de l'arrêté du 14 avril 2025. En définitive, alors que la France compte près de 30 000 communes rurales, cette réforme est la réaffirmation du soutien que l'Etat apporte aux territoires ruraux, à leur tissu économique et à l'emploi. S'agissant du second niveau de zonage, FRR « plus », ses critères de classement ont été précisés par l'article 99 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025, sur la base des propositions issues de la consultation menée préalablement avec les associations d'élus. Il s'agit de mieux cibler les communes vulnérables, notamment en permettant le classement en FRR « plus » des communes à l'échelle des bassins de vie et en réservant ce classement aux communes rurales au sens de la grille communale de densité de l'Insee Enfin, plus de 3 000 communes non classées en FRR ou ne bénéficiant pas de ses effets sont classées en zone d'aide à finalité régionale (AFR). La loi de finances pour 2024 a prorogé les dispositifs d'exonérations fiscales attachées à ce zonage jusqu'en 2027, en matière d'impôts sur les bénéfices (IR/IS) et d'impôts locaux (TFPB et CFE) pour les entreprises éligibles. En outre, le zonage AFR donne la possibilité aux autorités publiques, parmi lesquelles les collectivités et leurs groupements, d'octroyer dans des conditions plus favorables, des aides économiques aux entreprises dans le but de favoriser le développement de l'activité économique des territoires concernés. La stabilité des zonages FRR et FRR+ est importante pour permettre sa pleine efficacité. Le Gouvernement entend également pouvoir en évaluer les effets. Une inspection sera diligentée sur ce sujet prochainement, afin d'en apprécier l'impact et d'identifier les effets de bord éventuels liés à ce zonage.

Données clés

Auteur : M. Paul-André Colombani

Type de question : Question écrite

Rubrique : Ruralité

Ministère interrogé : Aménagement du territoire et décentralisation

Ministère répondant : Aménagement du territoire et décentralisation

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 30 juin 2025

Dates :
Question publiée le 1er avril 2025
Réponse publiée le 15 juillet 2025

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