Rôle de l'État dans la sécurisation d'Atos
Question de :
M. Édouard Bénard
Seine-Maritime (3e circonscription) - Gauche Démocrate et Républicaine
M. Édouard Bénard attire l'attention de M. le ministre des armées sur la situation préoccupante des très petites, petites et moyennes entreprises (TPE/PME) composant le socle de la base industrielle et technologique de défense (BITD). Dans le contexte géopolitique actuel, ces dernières semblent laissées pour compte par les politiques publiques et rencontrent des difficultés auprès de banques françaises peu inclines à participer à l'effort demandé aux contribuables. Face à l'enlisement de la guerre en Ukraine et le désengagement stratégique, progressif des États-Unis d'Amérique en Europe, la France a réaffirmé à de multiples reprises la nécessité impérieuse de bâtir une « Europe de la défense ». Une volonté qui suppose la consolidation d'une autonomie stratégique à l'échelle nationale et européenne devenue plus que jamais vitale, mais qui tarde à se concrétiser. Dans ce cadre, si les grands groupes français de défense (Thales, Dassault, MBDA, Naval Group ou encore Airbus) enregistrent de bons résultats, cela ne doit pas masquer le sort beaucoup plus inquiétant réservé à bon nombre de PME et TPE pourtant stratégiques pour la souveraineté française et l'avenir de l'Europe. En effet, on dénombre aujourd'hui environ 4 000 PME et TPE dont 1 000 d'entre elles sont essentielles. Avec plus de 210 000 emplois directs et indirects, elles sont devenues le visage d'un tissu industriel français exceptionnel et porteur d'innovation, au civil comme au militaire, l'un des plus performants en Europe. Mais pour ces entreprises, le tableau semble s'assombrir un peu plus chaque jour. Alors que le Président de la République multiplie les discours en faveur d'une « Europe de la défense », pointe du doigt la nécessité d'une autonomie stratégique et vante le savoir-faire français en matière de défense, les signaux d'alerte s'accumulent. Le ministère des armées a préféré le tandem HP-Orange à Atos pour son supercalculateur dédié à l'IA militaire, une décision qui soulève de nombreuses inquiétudes sur la cohérence de la stratégie d'indépendance numérique. Dans l'Isère, c'est Vencorex qui est menacée par le groupe chinois Wanhua alors que sa production de sel de haute pureté est essentielle à la fabrication de missiles M51. Ce ne sont pas les exemples qui manquent : Eolane, producteur de cartes électroniques, a récemment été placé en redressement judiciaire ; Verney-Carron, dernier fabricant français d'armes légères et fournisseur reconnu du GIGN et de l'armée française, est en passe de passer sous pavillon belge depuis l'offre de rachat du groupe belge FN Browning. Ces cas ne sont pas isolés et traduisent une tendance inquiétante, celle d'une stratégie politique du laisser faire qui témoigne du désintérêt du Gouvernement pour préserver les fleurons stratégiques français. Ce double langage affaiblit non seulement l'autonomie stratégique du pays, mais aussi sa crédibilité sur la scène européenne et internationale. Dans le même temps, la cadence de production imposée par l'effort de guerre ukrainien nécessite une mobilisation massive de l'appareil industriel français. Si la France entend jouer un rôle prépondérant dans le soutien à l'Ukraine, elle doit également se donner les moyens industriels d'une telle ambition. Il est paradoxal d'allouer des milliards à Kiev tout en laissant les fournisseurs stratégiques français sans soutien. Plusieurs solutions peuvent être alors envisagées. La mise sous contrôle temporaire par l'État, via des prises de participation ou des nationalisations partielles, constitue une réponse transitoire pour les entreprises en redressement judiciaire appartenant à des secteurs jugés d'intérêt vital. Au civil comme au militaire, le recours à des banques publiques d'investissement tels que Bpifrance, pourrait aussi permettre d'anticiper les tensions de trésorerie que subissent ces PME soumises à des exigences croissantes de cadence et de livraison. Aussi, il lui demande quels outils le Gouvernement envisage d'utiliser pour à la fois empêcher des raids hostiles dans ces entreprises et préserver leur pérennité.
Auteur : M. Édouard Bénard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : Armées
Ministère répondant : Armées
Date :
Question publiée le 15 avril 2025