Présence d'Israël au Salon du Bourget 2025
Question de :
M. Thomas Portes
Seine-Saint-Denis (3e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Thomas Portes interroge M. le ministre des armées sur la présence de l'État d'Israël au Salon international de l'aéronautique et de l'espace, plus connu sous le nom de Salon du Bourget, qui se tiendra du 16 au 22 juin 2025. Le 18 mars dernier, Israël a rompu un cessez-le-feu alors en vigueur dans la bande de Gaza, provoquant, en seulement vingt-quatre heures, la mort de 500 personnes, dont 200 enfants. Depuis cette date, la violence exercée par l'armée israélienne contre la population gazaouie a atteint une intensité inédite. C'est dans ce contexte que se tiendra, à l'aéroport du Bourget situé au nord-est de Paris, la 55e édition du Salon du Bourget, organisé par le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS). Evénement majeur à l'échelle mondiale pour les acteurs de l'industrie aéronautique et spatiale, ce salon est autant un espace d'exposition technologique qu'un lieu de transactions pour les acteurs du secteur militaire. Derrière les démonstrations grand public se cache en effet un marché de l'armement, où se négocient drones, satellites, avions de combat et missiles. Depuis le lancement de l'offensive israélienne sur Gaza, la participation d'Israël à des salons d'armement organisés en France suscite une indignation croissante. Accueillir un État accusé de crimes de guerre et de génocide dans un salon dédié au commerce des armes revient à faire preuve d'une complicité morale inacceptable. C'est cette pression populaire qui avait conduit à l'annulation complète des 74 stands israéliens initialement prévus au salon Eurosatory en juin 2024. Le 26 janvier 2025, le cabinet du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, annonçait qu'Emmanuel Macron avait « promis (...) que les compagnies israéliennes pourraient participer » au Salon du Bourget. De son côté, l'Élysée précisait que cette participation « pourrait être favorablement examinée, en conséquence du cessez-le-feu à Gaza et au Liban ». Or ce cessez-le-feu a été continuellement bafoué par l'armée israélienne. Pendant la trêve, plus de 150 personnes ont été tuées à Gaza, tandis que l'armée israélienne étendait son offensive à la Cisjordanie. Dans la nuit du 17 au 18 mars 2025, les bombardements sur Gaza ont repris, faisant en 48 heures plus de 500 morts, s'ajoutant aux quelque 48 000 décès officiellement recensés en 16 mois de conflit. Au 8 avril 2025, au moins neuf exposants israéliens figurent sur le site officiel du SIAE. Parmi eux, les géants de l'industrie d'armement tels que Rafael Advanced Systems, Israel Aerospace Industries, Elbit Systems, ainsi que le ministère israélien de la défense. À ces participants s'ajoutent plusieurs entreprises françaises et internationales impliquées dans la vente d'armes à Israël, parmi lesquelles Lockheed-Martin, BAE Systems, Leonardo ou encore Thales. Ainsi, la France et les organisateurs du salon s'apprêtent à offrir à un État accusé de génocide une tribune pour vendre des armes « testées au combat » sur les civils palestiniens, mais aussi pour se procurer les équipements qui alimenteront ses offensives présentes et futures. Permettre à Israël de prendre part à la 55e édition du Salon du Bourget revient non seulement à alimenter sa machine de guerre, mais également à donner une légitimité et une récompense tacite aux exactions perpétrées par son armée à Gaza, en Cisjordanie, au Liban et ailleurs. Plusieurs juristes soulignent aujourd'hui la transparence de l'intention génocidaire affichée par les autorités israéliennes. Le ministre israélien de la défense déclarait, peu après la rupture du cessez-le-feu, que les Gazaouis n'avaient d'autre choix que partir ou mourir. Jamais dans l'histoire récente un responsable militaire de si haut rang n'avait exprimé aussi clairement une volonté de destruction d'une partie d'un groupe humain. Ces propos viennent s'ajouter à des dizaines d'autres tenus par des responsables israéliens. L'organisation Amnesty international en a recensé 102 entre octobre 2023 et juin 2024. La Cour internationale de justice (CIJ) a pris en compte ces déclarations pour estimer qu'il existe un risque réel et imminent de préjudice irréparable au droit des Palestiniens de Gaza à être protégés contre les actes de génocide. Dans son ordonnance du 26 janvier 2024, la CIJ a enjoint notamment d'empêcher la perpétration, à l'encontre des Palestiniens de Gaza, de tout acte constituant un crime de génocide au sens de l'article 2 de la Convention de 1948 et de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir et sanctionner toute incitation directe au génocide. Cette ordonnance revêt un caractère contraignant. Tous les États parties à la convention, dont la France, signataire dès 1950, ont l'obligation de la respecter et de la faire respecter. La question de l'armement est donc centrale. La rapporteuse de l'ONU, Mme Francesca Albanese, affirme qu'il s'agit d'un génocide d'une dimension inédite, car les moyens de combat le sont également, notamment du fait qu'Israël est en train d'expérimenter de nouvelles armes sur les Palestiniens, dont des quadricoptères. La France doit donc cesser de favoriser, sous quelque forme que ce soit, le commerce d'armement avec Israël. À ce jour, le bilan officiel, largement sous-estimé, fait état de près de 52 000 morts dans la bande de Gaza depuis le 8 octobre 2023. Depuis la fin du cessez-le-feu, l'ONU estime à 400 000 le nombre de nouveaux déplacés, alors que la quasi-totalité des 2,4 millions d'habitants avait déjà été déplacés au moins une fois entre octobre 2023 et janvier 2025. Les Gazaouis, à nouveau pris au piège, sont bombardés, affamés et privés de soins, tandis que nourriture, médicaments, carburant, abris et équipements essentiels s'entassent aux points de passage, sans pouvoir être distribués. Alors que les experts internationaux, les Nations Unies et les ONG s'accordent pour parler de génocide, plus de 145 organisations, collectifs, syndicats et partis politiques français ont lancé un appel pour exiger l'interdiction de la participation israélienne au Salon du Bourget 2025. En réponse à cet appel et en cohérence avec la décision prise lors du salon Eurosatory en juin 2024, M. le député souhaite savoir s'il entend interdire officiellement la présence d'Israël au Salon du Bourget ; une telle décision relèverait non seulement d'un impératif moral et politique, mais également d'une obligation juridique, afin de se conformer aux mesures conservatoires ordonnées par la Cour internationale de justice.
Auteur : M. Thomas Portes
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Armées
Ministère répondant : Armées
Date :
Question publiée le 29 avril 2025