Question de : M. Matthieu Marchio
Nord (16e circonscription) - Rassemblement National

M. Matthieu Marchio alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la problématique de la gestion des déchets générés par les campements de migrants présents sur le territoire français. Des initiatives locales ont permis de quantifier l'ampleur de cette problématique. Par exemple, dans le Calaisis, une opération de nettoyage a permis de ramasser plus de 7,5 tonnes de déchets en seulement deux heures dans les campements de migrants, soit plus du double de ce que collecte annuellement l'association Environnement et solidarité. De même, dans le Boulonnais, une convention financée à 80 % par l'État a été signée avec l'association Rivages Propres pour ramasser les déchets laissés par les migrants, pour un montant de 208 000 euros. Ces exemples illustrent les coûts significatifs supportés par les collectivités locales et l'État pour la gestion des déchets liés aux campements de migrants. En conséquence, il lui demande quel est le coût annuel estimé de la gestion des déchets issus des campements de migrants, tant pour l'État que pour les collectivités locales, quelles sont les modalités de financement de ces opérations de nettoyage et enfin quelles mesures sont envisagées pour prévenir l'accumulation de déchets dans ces campements et réduire les coûts associés.

Réponse publiée le 25 novembre 2025

Le droit français encadre la gestion des déchets dans toutes les situations, y compris dans des contextes précaires ou informels. Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre sont ainsi chargés de la collecte et du traitement des déchets ménagers et assimilés. En application des articles L. 2224-16 et L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), le président de l'EPCI à fiscalité propre, ou le maire si celui-ci s'est opposé au transfert de ses attributions de réglementation de cette compétence, définit les règles relatives à la collecte des déchets, impose les modalités de collecte séparée, y compris le cas échéant la présentation et le lieu de collecte. De même, l'article R. 2224-24 du CGCT précise les modes de collecte possibles ainsi que leur fréquence au regard de la typologie du territoire concerné. En outre, les maires, agissant en vertu de leur pouvoir de police générale prévu à l'article L. 2212-2 du CGCT, sont responsables de la salubrité publique et assurent ainsi le nettoiement des voies et espaces publics. A cet égard, ils doivent mettre en œuvre les moyens nécessaires pour permettre le respect des normes d'hygiène dans l'espace public et dans tous les lieux de vie dont ils ont la responsabilité ou dont la commune est propriétaire. Les campements de migrants sont des espaces de regroupement de personnes et ne correspondent pas à la définition usuelle de ménages. Toutefois, la nature de ces campements ne doit pas empêcher la mise en place d'un dispositif de ramassage des déchets, notamment au regard des enjeux majeurs de salubrité publique, de respect de la dignité humaine et de protection de l'environnement que ces lieux peuvent soulever. Par ailleurs, la jurisprudence administrative et européenne s'est prononcée sur les obligations des autorités publiques en matière de collecte des déchets dans les campements de migrants. Le Conseil d'Etat et la Cour européenne des droits de l'homme considèrent que l'hygiène relève d'un besoin élémentaire et la carence de dispositifs suffisants est de nature à exposer ces personnes, de manière caractérisée, à des traitements inhumains ou dégradants, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale (CE, Ord., réf., 23 novembre 2015, nos 394540 et 394568 et CEDH, Cour (cinquième section), Affaire Khan c. France, 28 février 2019, 12267/16). Le Conseil d'Etat a, de ce fait, enjoint aux autorités publiques, notamment l'Etat « dès lors que les mesures à prendre pour faire face à l'afflux massif de migrants en provenance de l'ensemble du territoire national sur le site […] excèdent les pouvoirs de police générale du maire de la commune […], de mettre en place un dispositif de collecte des ordures avec l'installation de conteneurs-poubelles mobiles de grande capacité à l'intérieur du site et/ou de bennes supplémentaires, de procéder à un nettoyage du site et, enfin, de créer un ou plusieurs accès à l'intérieur du camp pour permettre l'accès des services d'urgence et le cas échéant le déplacement des conteneurs-poubelles ». L'action de l'Etat et des collectivités territoriales dans la gestion des déchets s'inscrit donc dans le cadre d'une obligation, l'Etat pouvant prendre en charge une partie des coûts supportés par les collectivités par le biais d'un conventionnement. Toutefois, une certaine marge d'appréciation est laissée aux collectivités, sous réserve que des mesures effectives soient mises en œuvre pour garantir un niveau minimal de salubrité et de protection de la santé. Le tribunal administratif de Lille a ainsi rejeté la demande de plusieurs associations souhaitant renforcer le système de collecte des déchets mis en place par la collectivité, dans la mesure où il résulte de l'instruction qu'un service de ramassage intervient deux fois par semaine (Tribunal administratif de Lille, 10 juin 2025, n° 2505113).

Données clés

Auteur : M. Matthieu Marchio

Type de question : Question écrite

Rubrique : Déchets

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Aménagement du territoire et décentralisation

Dates :
Question publiée le 10 juin 2025
Réponse publiée le 25 novembre 2025

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