Question écrite n° 8244 :
Réévaluation des grilles de programmes pour préserver la santé du sommeil

17e Législature

Question de : M. Thierry Frappé
Pas-de-Calais (10e circonscription) - Rassemblement National

M. Thierry Frappé attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur l'ampleur croissante des troubles du sommeil dans le pays, dont les études récentes montrent qu'ils entraînent une perte moyenne de 41 minutes de repos par nuit et par personne depuis trois ans. Ce phénomène a des répercussions sanitaires et économiques fortes : dégradation de la vigilance, augmentation des accidents de la route, altération des performances professionnelles, voire développement de pathologies chroniques telles que l'hypertension ou la dépression. Parmi les facteurs aggravants, l'organisation des principales chaînes de télévision paraît particulièrement préoccupante. Les programmes phares sont systématiquement programmés à partir de 21 heures et ponctués de deux plages publicitaires prolongées, décalant mécaniquement l'heure du coucher des téléspectateurs et exacerbant la stimulation cognitive en fin de soirée. Conscient des enjeux de compétitivité culturelle et économique qui poussent les diffuseurs à rechercher une audience maximale, il souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur l'impact de cette programmation sur la santé publique. Il souhaite également savoir si des mesures sont envisagées, qu'il s'agisse de recommandations aux organismes de régulation audiovisuelle, de révision des plages publicitaires en fonction de l'heure de diffusion, ou d'une incitation à décaler légèrement l'horaire de début des émissions de première partie de soirée, afin de préserver la durée et la qualité du sommeil des concitoyens.

Réponse publiée le 2 septembre 2025

Le législateur a souhaité garantir la liberté de communication audiovisuelle à l'article 1er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 qui dispose que son exercice ne peut être limité que par des motifs qu'il énumère, au nombre desquels figurent par exemple le respect de la dignité de la personne humaine, la sauvegarde de l'ordre public ainsi que la protection de l'enfance et de l'adolescence. La loi a confié à une autorité publique indépendante, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), le soin de garantir l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle et de s'assurer que les éditeurs de services de radio et télévision respectent les principes garantis par la loi. Elle dispose à cette fin d'un pouvoir de sanction en cas de non-respect des dispositions de la loi du 30 septembre 1986. Les éditeurs de services, privés comme publics, sont ainsi libres de leur programmation dans les limites qui viennent d'être rappelées et qui sont contrôlées et sanctionnées par l'instance de régulation. Concernant plus précisément les horaires de démarrage des programmes de première partie de soirée, il est nécessaire de distinguer deux sujets : d'une part, le démarrage de plus en plus tardif, au fil des années, des programmes de début de soirée et, d'autre part, les retards récurrents au regard des horaires annoncés dans la presse et sur internet. Concernant le glissement progressif des horaires de début de soirée, le cadre juridique n'impose pas de contrainte aux éditeurs en matière de fixation des horaires de programmation. Les chaînes sont donc libres de composer leur grille comme elles le désirent. S'agissant en revanche des retards, l'ARCOM a introduit dans les conventions des chaînes privées des stipulations en matière de respect des horaires : « Lors de la diffusion de ses émissions, l'éditeur respecte les horaires de programmation préalablement annoncés, sous réserve des contraintes inhérentes au direct et liées à des événements imprévisibles ». Le cahier des charges de France Télévisions comporte également des dispositions en la matière. L'article 19 relatif aux horaires de programmation prévoit en effet que la société « met en œuvre les règles de respect des horaires et de la programmation définies en accord avec l'ARCOM ». L'ARCOM dispose d'un pouvoir de sanction en cas de non-respect par les éditeurs de leur convention ou cahier des charges. Dans le cadre de sa mission de contrôle des obligations réglementaires et conventionnelles des éditeurs, le régulateur procède régulièrement à des relevés horaires. La dernière observation réalisée par l'ARCOM sur le premier semestre 2022 révèle ainsi une amélioration. Le retard moyen sur l'ensemble des chaînes nationales gratuites s'établit désormais à 2 minutes 49 secondes, contre 3 minutes et 54 secondes en 2021. Constatant néanmoins de fortes disparités entre les chaînes, l'ARCOM a auditionné, au mois d'octobre 2022, les éditeurs affichant les retards les plus importants pour les appeler au respect de leurs obligations. Concernant France Télévisions, l'ARCOM a estimé que le groupe public avait globalement respecté les horaires préalablement annoncés. S'agissant des messages publicitaires, les règles qui encadrent leur diffusion visent à protéger les téléspectateurs d'une trop forte exposition aux communications commerciales audiovisuelles ainsi que les recettes publicitaires des autres médias (presse écrite, radios) d'une trop grande captation par les services de télévision. Elles sont plus strictes que celles prévues par la directive 2010/13/UE du 10 mars 2010 sur les services de médias audiovisuels, directive qui fixe des règles minimales harmonisées. Le régime juridique français de la publicité télévisée est ainsi l'un de plus stricts d'Europe (plafonnement de la durée moyenne quotidienne et pour une heure donnée, restriction en matière d'interruption des programmes, régime plus strict pour les chaînes publiques, etc.). Le régime applicable aux chaînes privées fait toutefois l'objet depuis plusieurs années d'un assouplissement progressif pour assurer la pérennité du modèle économique des services de télévision confrontés à la concurrence croissante des nouveaux acteurs numériques (services de médias audiovisuels à la demande, plateformes de partage de vidéo) qui ne sont pas soumis aux mêmes contraintes (notamment du fait de leur établissement sur le territoire d'autres États membres de l'Union européenne). Le Gouvernement n'envisage pas de modifier les règles d'interruption publicitaire des programmes en fonction de l'heure de diffusion de ces derniers. Enfin, la question de l'impact des horaires de programmation des chaînes de télévision sur la qualité du sommeil des citoyens relève du ministère de la santé. Dans le cadre de la Grande cause nationale 2025 dédiée à la santé mentale, le ministère de la santé a d'ailleurs dévoilé, le 22 juillet dernier, la nouvelle feuille de route interministérielle 2025-2026 pour la promotion d'un sommeil de qualité et la prévention de ses troubles. Ce plan d'actions mobilise plusieurs ministères, dont le ministère de la culture.

Données clés

Auteur : M. Thierry Frappé

Type de question : Question écrite

Rubrique : Audiovisuel et communication

Ministère interrogé : Culture

Ministère répondant : Culture

Dates :
Question publiée le 8 juillet 2025
Réponse publiée le 2 septembre 2025

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