Suspension anormale de la pension militaire en cas d'engagement dans la Réserve
Question de :
M. Alexandre Dufosset
Nord (18e circonscription) - Rassemblement National
M. Alexandre Dufosset attire l'attention de M. le ministre des armées, sur la situation des militaires retraités qui décident de s'engager dans la réserve opérationnelle et en particulier sur les conditions de suspension de leur pension de retraite et l'émission de titres de perception pour trop-perçus. Conformément aux articles L. 79 et L. 80 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les militaires retraités peuvent cumuler leur pension avec la solde de réserve tant que les services accomplis ne dépassent pas un mois de manière continue. Au-delà de cette durée, la pension doit être suspendue et les services accomplis peuvent ouvrir droit à une révision de pension, sous conditions (notamment six mois de service effectif dans un nouveau grade - arrêt du Conseil d'État, 4 février 2021, n° 439662). Toutefois, dans la pratique, de nombreux retraités se retrouvent confrontés à une suspension rétroactive de leur pension, parfois plusieurs années après les faits et à l'émission de titres de perception visant à recouvrer des sommes indûment versées. Or l'article L. 93 du même code limite expressément à trois années plus l'année en cours la possibilité pour l'État d'exiger la restitution des pensions versées indûment (sauf cas de fraude ou de mauvaise foi). Le Conseil d'État a confirmé cette règle, précisant qu'en dehors de la fraude, l'administration ne peut remonter au-delà de cette période (arrêt du 4 mars 2021, n° 433653). En outre, selon l'article R. 91 du code précité, la charge de la déclaration des revenus d'activité (dont les soldes de réserve) incombe à l'administration employeuse. Cette interprétation a été retenue par le tribunal administratif d'Orléans (arrêt du 1er décembre 2022, n° 2003002), qui a estimé que le ministère des armées devait avoir connaissance de la situation du militaire et transmettre ces informations au service des pensions. L'omission de cette déclaration constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'État. En cas de contestation d'un titre de perception, les articles 117 et 118 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique prévoient que le recours gracieux auprès du comptable public est préalable et obligatoire et suspend automatiquement le recouvrement des sommes en litige. Le Conseil d'État l'a confirmé (CE, 25 juin 2018, n° 419227), précisant que ces recours ne relèvent pas de la commission des recours des militaires. Enfin, selon l'arrêt n° 420489 du Conseil d'État du 20 septembre 2019, même en cas d'indu avéré, l'administration dispose d'un délai de cinq ans à compter de la connaissance de la créance pour émettre un titre de perception. Face à des pratiques si manifestement injustes, il lui demande si le Gouvernement envisage de rappeler aux services que la charge de déclaration des soldes de réserve incombe à l'administration employeuse, de garantir l'application de la prescription quadriennale prévue à l'article L. 93, sauf preuve formelle de fraude ou de mauvaise foi du réserviste, et de sécuriser juridiquement la situation des réservistes retraités par une circulaire d'harmonisation, précisant les droits, les obligations et les voies de recours en cas de suspension de pension ou de titre de perception émis au-delà des délais légaux.
Auteur : M. Alexandre Dufosset
Type de question : Question écrite
Rubrique : Retraites : fonctionnaires civils et militaires
Ministère interrogé : Armées
Ministère répondant : Armées
Date :
Question publiée le 8 juillet 2025