Question de : M. Ian Boucard
Territoire de Belfort (1re circonscription) - Droite Républicaine

M. Ian Boucard appelle l'attention de M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice sur certaines situations d'inégalités qui peuvent survenir lors du règlement des successions. En effet, dans le cadre d'un héritage, le droit français repose sur le principe d'égalité entre les enfants, inscrit dans l'article 735 du code civil. Toutefois, certaines dispositions légales peuvent, dans leur application, générer des écarts importants entre héritiers. C'est notamment le cas des clauses de non-réévaluation insérées dans certaines donations, prévues par l'article 860 du code civil qui dispose : « Le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation ». Si cette règle respecte la liberté des donateurs dans la gestion de leur patrimoine, elle peut néanmoins provoquer une inégalité entre héritiers réservataires lorsque la valeur des biens concernés augmente ou diminue considérablement entre la date de la donation et celle du partage successoral. Cette situation soulève des interrogations, notamment lorsqu'aucune volonté clairement exprimée par les parents ne vient justifier un tel déséquilibre. Il lui demande donc si le Gouvernement envisage d'engager une réflexion sur l'encadrement de l'application de ces clauses afin de mieux garantir l'égalité entre héritiers.

Réponse publiée le 2 décembre 2025

Afin d'assurer une certaine égalité entre les héritiers qui ont reçu des donations du vivant du défunt et les autres, le code civil prévoit que, par principe, lorsqu'un héritier a reçu des donations du vivant du défunt, la valeur de ces donations doit être réintégrée dans la masse des biens à partager, dans le cadre du « rapport des libéralités » (articles 843 et suivants du code civil). Les modalités de calcul du rapport sont prévues par l'article 860 du code civil,  qui pose le principe suivant lequel les biens rapportables sont évalués sur la base de la valeur du bien à l'époque du partage, selon son état matériel et juridique à l'époque de la donation. Ce mécanisme, précisément destiné à assurer l'équilibre entre les droits des héritiers, vise à reconstituer fictivement le patrimoine du défunt comme s'il n'avait jamais transmis le bien, en lui attribuant la valeur qu'il aurait naturellement acquise avec le temps, sans tenir compte des améliorations ou transformations réalisées par le donataire. Ces modalités de calcul du rapport ne sont toutefois pas d'ordre public, et le troisième alinéa de l'article 860 du code civil prévoit qu'elles sont applicables « sauf stipulation contraire dans l'acte de donation ». La jurisprudence admet ainsi, par exemple, les clauses de rapport forfaitaire, qui consistent à fixer à l'avance un montant à rapporter, indépendamment de la valeur réelle du bien au jour du partage (1ère Civ, 12 janvier 1983, pourvoi n° 81-16.698, Publié au bulletin). En tout état de cause, ces libéralités ne peuvent pas porter atteinte aux droits des héritiers réservataires. Ainsi, lorsque la donation dépasse la quotité disponible, l'héritier donataire doit une indemnité à ses cohéritiers. En pratique, en application de l'article 858 du code civil, l'héritier gratifié conservera le bien dans son patrimoine et recevra une part réduite sur les autres biens de la succession, à hauteur de la valeur de la donation. Les règles prévues par le code civil permettent donc d'assurer un juste équilibre entre la protection des héritiers réservataires d'une part, et la liberté de disposer de ses biens d'autre part.

Données clés

Auteur : M. Ian Boucard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Donations et successions

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 12 août 2025
Réponse publiée le 2 décembre 2025

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